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(Cet article est le premier publié en 2011 sur overblog)
Dans ce blog, il n'y aura rien sur le skateboard, rien sur les customs, rien sur le surf, rien sur les montres et les stylos de luxe, rien sur les chaussures de luxe et les fringues de même, rien sur l'architecture d'avant-garde, rien sur les produits hi-tech, rien sur les automobiles de sport ou de course (sauf cyclecars), rien sur le rock, rien sur, rien... (ajouter votre "rien" à vous)
Un p'tit Mickey en guise d'éditorial...
(Avec mes remerciements anticipés au talentueux artiste BOUCQ pour sa participation involontaire avec cette œuvre qui résume bien des choses que chacun de nous comprendra...)
Chaque fois que cela sera possible, et chaque fois qu'un document nouveau sera découvert sur la moto d'avant 1914 (de préférence française), il sera publié sur ce blog. Toutes précisions complémentaires sont bienvenues, mieux, sollicitées !
Merci de ne pas poser de "questions subsidiaires", sauf si elles présentent un intérêt pour la collectivité...
RÉVÉLATIONS SUR LE CIRCUIT DES ARDENNES 1905
(Extrait de La Gazette Dunlop. Année ?)
8 commentaires -
Il est plus que probable qu'un recensement des motos de la grande île cubaine mettrait au premier rang les marques soviéto-russes ou des ex-pays satellites. Ensuite viendraient les marques américaines (du Nord), ou plus exactement Harley-Davidson tout seul. En effet, Indian a trop tôt disparu pour faire nombre et la présence des Cushman ou Whizzer est anecdotique. La passion des Harlistas n'a rien à envier à celle de leurs homologues du pays voisin - et néanmoins ennemi jusqu'à plus ample informé. Comme eux ils endossent la "jacket" en jean ou en cuir constellée des "colors", insignes et patches divers témoignant de leurs exploits sportifs ou autres (surtout autres...).
Le mimétisme poussé à l'extrême donne des images curieuses. Ainsi ces inscriptions sur les cuirs des motards cubains qui se télescopent et trahissent une forme d'allégeance à l'impérialisme étasunien tant détesté par ailleurs. D'un côté tous les murs du pays appellent à la poursuite de la "Revolucion" et proclament qu'il est essentiel de "Preservar y perfeccionar el socialismo", des exhortations renforcées par les portraits de Fidel Castro et du Che. D'un autre côté, des motards paradent avec sur le dos les badges des "Cuban Harlistas" ou des "Latino Americanos Motociclistas Asociacion", la LAMA, qui n'accepte que les motos de plus de 650 cm3 - tiens donc - et a été créée à... Chicago ! Pour faire quand même acte de patriotisme, les couleurs cubaines figurent aussi sur ces insignes, mais encadrées par les ailes largement déployées de l'aigle-que-vous-savez. Parfois c'est carrément tout le logo Harley-Davidson qui est représenté, marque et aigle.
"Tu dois voir chaque jour comme un enfant pur... ou comme un homme pur" proclame le Che sur ce panneau d'affichage. Le pourfendeur des valeurs de l'impérialisme des États-Unis qu'il fut a dû se retourner plusieurs fois dans sa tombe en voyant sa deuxième patrie sombrer dans la société de consommation. Même s'il y a encore peu à consommer...
Cette fascination/répulsion - le père Freud aurait surement des choses à en dire - n'est pas à sens unique. Les Yankees l'éprouvent aussi et elle perdure malgré les cahots de la vie et les fluctuations de la politique. Sans remonter à "Papá" Hemingway, dont la maison à quelques
kilomètres de La Havane, est devenue un musée, la salsa (ci-contre), le mojito et les Monte Christo n° 2 sont des symboles connus, et appréciés, à travers le monde. Sans oublier le cuba libre où se mêlent fraternellement le marxisme-léninisme et le capitalisme le plus affirmé sous la forme du Coca Cola. Bientôt, et si l'avenir apporte un plus grand réchauffement des rapports entre les deux rives du détroit de Floride, il faudra ajouter à ces nourritures terrestres les autos et motos cubaines devenues par la force des choses des pièces de collection. Elles deviendront autant de proies pour le dollar US auquel il sera bien difficile de résister...Voici ce qui fait la différence entre un photographe professionnel comme Michael Lichter et un amateur comme vous et moi (moi, surtout, vous je ne sais pas). Tout Cuba en une seule photo : l'entrée décrépite d'un palais (aujourd'hui restaurant La Guarida) datant de l'occupation espagnole avec son portail aux vantaux sculptés ; la fresque célébrant Fidel Castro jeune, encore en chapeau, veillant sur la Harley (1946 et +) de José Manuel Pacheco Denis (photo Michael Lichter).
Les motos de l'île commencent à être bien connues - presque répertoriées - depuis que des photographes de renom ont visité La Havane. Ils ont fait des photos, puis des livres centrés sur le célèbre twins en V. Démarche artistique, certes, mais aussi commerciale pour la bonne raison que, sauf dans une frange éclairée, le quidam américain ne s'intéresse guère et ne connait que mal les machines des marques étrangères. Le plus "hip" de ces photographes est Michael Lichter, célèbre pour ses reportages sur les grands raouts motocyclistes tels que la Bike Week à Daytona, le rallye de Sturgis, le Cannonball Endurance Run ou la Biketoberfest. Il a été chargé en 2009 de "couvrir" l'opération de charme de Metzeler qui a offert 70 trains de ses pneus à des harlistas cubains. Michael en a profité pour réaliser à titre personnel un important reportage sur les 300 Harleys cubaines, survivantes d'un parc de 2000 environ que Cuba comptait en 1959 (photo ci-dessus).
Parmi ces 300 se trouve la doyenne qui date de 1937 (ci-dessus, mais il y aurait un Servi-Car de 1932), une latérales qui n'est pas moins bien entretenue que les autres Harleys et participe aux rallyes cubains sans exclusive de marques. Car si les twins américaines font souvent l'actualité sur les routes grâce à des démonstrations, par leur nombre, et par leur bruit...), il existe des clubs réunissant d'autres marques, les anglaises en particulier.
La "Escuderia de Motores Ingleses Classicos de C. Habana" dans son énoncé exprime clairement son but : rassembler les motos anglaises. Elle le fait avec sérieux et tient un registre des machines classées par marque et avec le nom de chaque propriétaire. Le gros des troupes se partage entre les BSA et Triumph des années 60, ce qui montre sans doute l'influence américaine - encore une fois - des compétitions de l'époque (Daytona...) qui se déroulaient au sommet entre ces deux protagonistes, plus Harley évidemment.
Comme sur la majorité des grosses cylindrées cubaines, cette BSA twin est protégées par d'imposants pare-chocs. Très exposés à l'usure et aux chocs, les silencieux sont des "consommables" impossibles à remplacer, d'où des adaptations personnelles indispensables. Cependant toutes les personnalisations ne sont pas faites que pour la galerie, il en va ainsi du freinage avant par disque...
Impeccable BSA Bantam deux-temps de 1953 qui a subi tout de même le régime "chopper" des plus grandes : guidon "hi-rider" et commandes au pied avancées. Le "sissy bar" est censé retenir le passager de Onelio Garcia Pérez en cas d'un improbable "wheeling".
Autre échappement et silencieux de secours sur cette 250 BSA 1948 qui semble avoir "fauté" de l'avant avec une machine de l'Est (MZ ?). Le porte-valise latéral est bien là pour signer une grande routière.
Lorsqu'une Triumph rencontre une Honda, le mariage est inattendu mais pas vilain. Tentative d'y retrouver ses petits : moteur Triumph 650 (c'est écrit dessus) de 1951 et Felix Perez Otaño le dit aussi. Idem concernant le réservoir. Pour le reste, on va à l'aventure : boîte à vitesses de BSA (?) avec commande de sélecteur avancée ; partie-cycle de Honda (?), du moins les roues... La fourche ? Le concours reste ouvert ! (Photo bedincuba comme la précédente).
Une 650 Triumph de 1952 comme on aimerait en trouver dans cet état. Peu de modifications visibles hormis les échappements et le polissage du réservoir d'huile et du coffre à outils. Pilote : Julio Damaso Zamora Cruz (Photo par Wladimir Nequesaurt Neto, comme pour l'autre Triumph rouge ci-après).
Comme c'est souvent le cas, l'abondance de moto-collants est un cache-misère qui permet d'effacer les cicatrices et bosses récoltés tout au long d'une vie mécanique. En l'occurrence, vu les circonstances on pardonnera cet excés...
... d'autant plus facilement que l'ensemble, compte tenu des pratiques cubaines, est très loin de faire honte au constructeur de Meriden.
Mariez une fourche moderne d'une moto d'enduro (ou cross ?) avec une classique Triumph cylindre fonte (ça se voit...) et vous obtenez sans forcer un "chopper" qui en vaut bien d'autres. Quoique... le top-case... les clignotants... pas très "Easy Rider" tout ça.
La famille Fernandez, Père et Fils sur une 600 Norton Dominator 99 de 1958 très proche de l'origine hormis le frein avant à disque et les silencieux "lyophilisés". À Cuba, le casque se porte généralement "léger" et il ne semble être obligatoire que pour les pilotes de "motos-taxis" (quelqu'un peut confirmer ?).
Une 600 Norton plus ancienne, la M7, précédant la génération qui allait recevoir le nouveau cadre "Featherbed". Le polisseur de bidons est passé par là et ici aussi les échappements sont simplifiés. Pédale de kick d'origine japonaise, peut-être celle d'une Kawasaki H2 réputée assez malléable (la pédale seulement...). Voir commentaire de JMH en fin d'article
Couleur inattendue sur cette 500 Norton Dominator 88 de 1952, mais on n'oublie pas que le rouge a souvent été utilisé par Norton, alors pourquoi pas le bleu (des Vincent ont été rouges aussi). Bien préservée, il ne manque que les silencieux en "poire" à la machine de José Lazaro Pardo Cruz (Photo ci-dessus et précédente par Wladimir Nequesaurt Neto).
On ne peut pas trop se fier à ses yeux en regardant les motos de Cuba où il est peut-être nécessaire d'en passer par des accommodements avec la loi, ou les assurances. Ce qui provoque des différences entre le papier et la chose qu'il représente. Ainsi le "M" sur ce réservoir est celui de Matchless, marque qui a pu fournir le cadre alors que le moyeu avant trahit un apport "estien". Quant au moteur, on aura reconnu le gros 750 twin de la Royal-Enfield Interceptor... À noter la forme du guidon qui a su résister à la mode chopper.
À peu près conforme à l'image du catalogue, cette belle Matchless est une twin 500 G 9 de 1957 (ou G11 si c'est une 600 cm3). Le dessin légèrement flasqué du garde-boue avant est caractéristique de la marque. La livrée en chrome et gris-argent lui va bien et rappelle celle des Norton Dominator. Rien que du classiques, donc.
Cependant, si vous la préférez en rouge, nous avons ce modèle, mais ce sera une AJS, absolument identique. Prête à démarrer dès que l'antivol (rouge aussi) sur la roue avant sera retiré (Photo www.taringa.net).
Une Ariel monocylindre qui semble avoir vécu au point d'avoir nécessité pas mal de jus de cervelle pour faire tenir son moteur dans une partie-cycle manifestement pas prévue pour lui (voir la fixation par des platines à l'avant du carter-moteur). On retrouve le disque avant qui semble n'avoir qu'un seul fournisseur sur toute l'île.
Wladimir Nequesaurt Neto est un photographe de goût qu'on a abondamment sollicité ici. À juste titre puisqu'il nous permet de nous quitter sur une bonne impression, avec une anglaise plus anglaise que toutes : une 350 Velocette MAC de 1953 (propriétaire : Cresencio Bello Rodriguez).
Le kick d'une Izh... voir commentaire de JMH ci-dessous.
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L'encre de l'armistice signé le 22 juin 1940 est à peine sèche que les occupants allemands se mettent à "organiser" la France et ses industries. On crée donc des Comités d'Organisation (CO). Dès juillet les restrictions se font sentir dans tous les domaines de la Zone occupée. Le reste du pays, vite surnommé la Zone "nono" (non occupée), sera envahi le 11 novembre 1942, suite au débarquement des Alliés en Afrique du Nord. Le 16 août naissent les CO de l'Automobile et du Cycle mis en place par un obéissant ministère de l'État
français (gouvernement de Vichy) qui complète la farce en précisant qu'il a agit "en accord avec les autorités d'occupation". Tout véhicule devra désormais avoir pour circuler un "S.P." délivré par le Préfecture de police. Bientôt ça ne sera pas suffisant et les Allemands prendront les choses en main. Il faudra présenter un Ausweis (pièce d'identité, laissez-passer) dûment visé par l'occupant. La circulation de véhicules qui ne bénéficient pas d'une dérogation est interdite à partir de 21 heures jusqu'à 6 heures du matin. Idem dimanches et jours fériés.LES AFFAIRES SONT LES AFFAIRES
Échappent à ces restrictions les médecins, infirmières, sages-femmes, pompiers, certains journalistes, etc. Rationnée, l'essence nécessite des tickets qui permettent d'acheter le précieux carburant à 5 F 38 le litre. C'est le prix officiel, mais sur un marché noir qui n'a pas tardé à s'établir, elle atteint les 9 puis 12 F (la valeur de 3 kg de pain, 300 gr de viande ou 4 œufs !). L'occupant n'est pas le dernier à participer et à profiter de ce marché parallèle, amateur qu'il est de la lingerie française, bas de soie, parfums qui feront le bonheur de la "gretchen qu'il a abandonnée pour le "blitzkrieg". Il s'est dit qu'à Paris environ 800 Ausweis avaient ainsi été échangés contre des avantages en nature. Mais c'est un commerce sans commune mesure avec celui qui est pratiqué de façon "officielle", grâce au butin des pillages, expropriations, ou récupérations effectuées aux dépens des "ennemis de l'État", des Juifs ou des apatrides. Des collections d'objets d'art, de meubles, de tableaux de maîtres prendront ainsi par wagons entiers le chemin de l'Allemagne. Cette razzia s'effectue à des niveaux bien plus élevés et parfois avec l'accord implicite des "volés". De nombreux industriels français passent des accords avec les industriels allemands. Leurs usines accepteront de fournir des produits finis ou des matières premières. Voire du matériel de guerre, moteurs d'avions, munitions, pneumatiques, etc.
L'EXEMPLE DE GNOME-RHONE
Dans notre domaine, l'entreprise emblématique la plus connue est Gnome-Rhône. Dirigée par Paul-Louis Weiller, elle est "aryanisée" au moment des lois anti-juives promulguées par Vichy à l'automne 1940. Arrêté, P.- L. Weiller s'évadera pour rejoindre le Canada, via le Maroc. Chez Gnome, on fabriquera des moteurs d'avions Gnome et BMW alors que les sabotages commencent à se propager parmi les ouvriers, surtout à partir de juin 1941, date de la rupture du pacte germano-soviétique... Souvent remplacés par des femmes (Plus de 1 million de Français sont prisonniers de guerre), ils vont être incités à partir travailler en Allemagne. Ce sera d'abord à titre volontaire puis, par manque de candidats (240 000 seulement), ils seront soumis comme d'autres Français au S.T.O. (Service du travail obligatoire, institué par Vichy sous la pression allemande) à partir de février 1943. Avant de partir, P.-L. Weiller avait demandé à son successeur de maintenir une certaine production, ne serait-ce que pour que les ouvriers aient de quoi vivre et pour garder les machines en état. Selon le livre "Gnome & Rhône - L'histoire des motocyclettes" (1) il a été construit, outre des vedettes rapides et des hélices, 8 872 moteurs d'avions et 3 255 motocyclettes. Parmi ces dernières on trouve un millier de 100 cm3. C'est la cylindrée maximum autorisée par l'occupant qui a repris la législation française antérieure. Et c'est à partir de ce premier "Type R1" que Gnome & Rhône va développer ensuite, après la Libération, son programme de 125, puis 175 et 200 cm3.
Modèle extrêmement rare, car produit à peu d'exemplaires dans des conditions difficiles, la R1 (ci-dessus) perdra ensuite son cylindre en aluminium chemisé pour un cylindre fonte à un seul échappement. La partie-cycle en éléments d'acier embouti restait fidèle à la technique des grosses cylindrées d'avant guerre. L'acier embouti cèdera plus tard au tube.
Autre détail technique, le carburateur passera dans l'axe, derrière le cylindre. Le carter d'embrayage arrondi est caractéristique des Gnome-Rhône des séries successives (Ces deux photos proviennent du site de l'Amicale Gnome & Rhône).
Ceux (et celles ?) qui ont la chance de pouvoir rouler doivent masquer le phare de leur véhicule en ne laissant à la lumière qu'une ouverture de 1 cm d'épaisseur pour 10 cm de large. Ils doivent aussi trouver le carburant, même si l'appétit de certains est léger, ici un vélomoteur de la fin des années 30, le 100 Terrot deux-temps (qui nécessite aussi de l'huile, autre ingrédient rare...).
Cette photo faisait partie d'une série où l'on voyait l'atelier présumé être celui d'un Chantier de Jeunesse dans le premier article de cette série. On va retrouver ci-dessous la même machine dans un autre décor, mais avec un personnage déjà vu dans le premier article. Elle a été immatriculée à Paris en mars 1940, quelque mois avant l'armistice et à un moment où la France croyait encore que l'Allemand allait être éparpillé par les canons de notre ligne Maginot. Penser à faire de la moto à ce moment-là témoignait d'une belle confiance dans la supériorité de notre armée. Il est vrai qu'elle était alors "la meilleure du monde"...
Cette Dollar (R3 ?) est dans une version luxueuse par ses pièces abondamment chromées et un changement de vitesse par sélecteur au pied droit (sans doute un Vitex adaptable). En agrandissant la photo - on clique - on le voit mieux quoiqu'à demi caché par le mollet de la demoiselle. Enfin cette 350 culbutée arbore une suspension arrière coulissante apparue au Salon 1930. C'était une avancée exceptionnelle dans la production française de l'époque. Avec cette architecture d'un dessin très personnel sinon très efficace, Dollar prenait ainsi rang auprès des René-Gillet, Monet-Goyon, Koehler-Escoffier et de quelques marques plus épisodiques comme B.C.R., Clément-Berceuse et autres Verlor.
Après Paris, la Dollar se retrouve dans la Creuse alors en zone non-occupée. L'indication des lieux est fournie par le camion immatriculé dans ce département, avec le nom du propriétaire et son domicile : " Chevalier (??) Boussac - Creuse". On aura remarqué la touche élégante apportée par la queue de carpe qui prolonge les deux échappements.
Encore une photo d'époque qui pose un problème d'interprétation. Ce 100 René Gillet présente sur son phare l'occultation réglementaire (peinture) durant l'Occupation. Par contre, son réservoir brillamment chromé ainsi que ses silencieux ne sont pas en accord avec les restrictions instaurées sur les matières premières dans ces années. Explication possible : ce 100 que l'on pensait avoir été créé durant les années 1940-44 aurait déjà existé à la veille de la guerre. Autre sujet de complication : son absence de pédales indique qu'il est postérieur à juin 1943, lorsque le Secrétariat d'État aux communications avait annoncé par décret l'abandon de cet "accessoire". Il élevait également à 125 cm3 la cylindrée de la catégorie des "vélomoteurs"...
...mais René Gillet ne profitera pas de cette largesse. En 1944 il publie un prospectus daté du mois de janvier (extrait ci-dessus) présentant son Type V à 3 vitesses mais dont la cylindrée est restée à 100 cm3. À la peinture près, il est tout à fait semblable au modèle à réservoir chromé et présente lui aussi le réglementaire phare obturé. On était alors à 6 mois du Débarquement...
Les trois vitesses sont commandées par un levier à main sur secteur situé à droite du réservoir. Comme plus tard sur certaines japonaises (Kawasaki H2), les vitesses sont "en ligne" : le point mort se situe après la première et non entre celle-ci et la seconde, comme il est d'usage. La plaque oblique que l'on aperçoit derrière le carter-moteur porte un petit index mobile qui indique quel est le rapport engagé. Le sélecteur au pied à double-branche sera adopté avec le modèle V 1 d'après-guerre.
LE TRIOMPHE DES PETITS INVENTEURS
De même que le Monsieur Jourdain de Molière faisait de la prose sans le savoir, les motocyclistes des années 39-45 vont se mettre à faire du "vintage" avant la lettre. Tout ce qui tenait sur deux roues avec un moteur fut, quel que soit son âge, ressorti des granges, des garages, voire des greniers et remis sur la route. Encore fallait-il trouver de quoi en remplir le réservoir. Rationnée à outrance, l'essence se négociait à prix d'or pour quiconque n'y avait pas droit pour son travail. Gourmand en tout, l'occupant allemand l'est particulièrement de ces produits qui font tourner ses avions, ses Panzers, ses camions, ses auto-mitrailleuses et ses motos. La menace alliée se précisant, et tandis que le front russe suscite des inquiétudes allemandes, tous les produits stratégiques sont accaparés au profit de la Wehrmacht. En 1942, l'allocation d'essence est donc supprimée à tout véhicule de moins de 1 tonne de charge utile. Pour les Français, il devenait chaque jour plus urgent de pousser le développement de formules de remplacement du carburant. La plus courante et la plus accessible sera le gazogène.
Dès octobre 1941, le numéro spécial "automobile" de la célèbre revue donnait sous le pinceau de Géo Ham une image de ce qui n'était déjà plus une anticipation. Quoique lourd et encombrant, le gazogène s'adapte relativement facilement sur un camion, un peu moins sur une voiture particulière. Sur la moto cela apparait impossible malgré l'image idyllique qu'en donne Géo Ham. En premier lieu, il faut connaître les rudiments du fonctionnement de cet appareil qui ne sert pas vraiment à griller des châtaignes...
LE GAZOGÈNE, COMMENT ÇA MARCHE. 1 - Entrée d'air et orifice par lequel on allume le foyer. 2 - Générateur chargé de charbon de bois qui, en se consumant lentement, fournit du gaz carbonique (Certains gazogènes fonctionnent au bois). 3 - Gaz chauds non épurés. 4 - Tube refroidisseur. 5 - Boîtier épurateur. 6 - Filtre en toile métallique et tissus. 7 -Trappe permettant de vider à intervalles réguliers l'eau de condensation ainsi que les résidus et goudrons. 8 - Conduite des gaz refroidis et épurés. 9 - Prise d'air additionnelle comportant une turbine de forge pour forcer l'air vers l'admission. 10 - Commande de l'accélérateur-mélangeur. 11 - Vers le moteur (Et maintenant, roulez jeunesse !).
Assez tôt, des fabricants ont proposé des gazogènes "prêts à poser" sur camions et voitures. On en a compté une bonne trentaine entre 1940 et 1944. Le motocycliste ne représentait sans doute pas une clientèle assez nombreuse car on ne connaît qu'un seul modèle destiné à une... 100 René Gillet !.
Habitué à la mécanique et ingénieux par nécessité, le motocycliste des années 30 devait souvent savoir se dépanner seul sur des machines plutôt simples C'est ainsi que du côté d'Issoire, M. Castiblanque s'attaqua en toute confiance à la construction d'un gazo pour sa Gnome & Rhône D3, une 500 latérales. Il était assez doué car sa machine traversa toute l'Occupation et fera beaucoup plus tard le bonheur d'un collectionneur qui l'acheta au fils de son créateur (ci-dessus). Aux dernières nouvelles, elle avait pris sa retraite dans la collection de l'Amicale Gnome & Rhône chez SAFRAN.
À droite, le volumineux boîtier-épurateur marqué "Casti", c'est le 5/6 du dessin. Au dessous se trouve la petite turbine de forge qui force l'air vers le cylindre, via le carburateur mélangeur 9 que l'on retrouve ci-dessous.
Une fois bien allumé, le gazogène fonctionnait en circuit fermé. Pour la nuit, il suffisait de ne laisser qu'une petite ouverture à l'entrée du foyer. Mais pour le démarrage "à froid", il fallait l'aider avec la méthode classique : essence + air, d'où la présence d'un carburateur dont on coupait ensuite l'alimentation.
Chargé de charbon de bois, le générateur (2) qui transmet les gaz à l'épurateur par le gros tuyau arrondi à l'arrière, comporte à sa base une trappe ronde permettant l'allumage. C'est aussi par là qu'on retirait à intervalles réguliers les cendres et les scories produites par l'appareil. Cette opération était vitale pour ne pas étouffer la combustion. Au cas contraire, il fallait vider le générateur de tout le charbon de bois qu'il contenait et repartir de zéro.
(1) "Gnome & Rhône - L'histoire des motocyclettes". par Daniel David, Alain Chapeau et Stéphane Clergerie. Amicale des motos Gnome & Rhône - 2001.
À suivre : Les autres moyens de rouler à moto sans essence.
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Une page volante et, bien sur, non datée. Si quelqu'un connait ?
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(On clique pour agrandir les images)
Chacun connaît le monde jurassique selon Spielberg et plus récemment avec "Jurrasic World". C'est farci de dinosaures et autres bestioles très méchantes, des choses en "saurus" ou des machins en "pteryx". Entre 200 et 145 millions d'années nous en séparent aujourd'hui, des années pendant lesquelles le "vivant" a évolué, nous compris. Il faut la magie du cinéma pour faire renaître un tel monde, mais en ce qui regarde la moto, c'est plus facile. Il suffit d'un billet d'avion et au bout de 9 h 40 en l'air vous êtes au cœur de "Jurassic Bikes", dans un pays où la moto (et l'automobile) n'ont pas bougé depuis 53 ans.
Une éternité au regard des progrès techniques qui ont déferlé depuis le blocus sur Cuba instauré par les États-Unis en 1962.Auparavant, ce pays à 150 km du continent nord-américain, était officiellement vanté comme L'ile des Vacances sous les Tropiques (ci-contre), mais il était surtout connu de façon moins reluisante comme étant "le bordel de l'Amérique" avec dictateur, mafia florissante et décomplexée, trafiquants de tout, paris sur courses hippiques, casinos de jeux, prostitution, blanchiment d'argent à grande échelle, corruption, drogue, tandis qu'une grande partie de l'économie de l'ile était aux mains d'entreprises américaines. Pour complaire aux
touristes à dollars, on avait même élargi des routes (à gauche, la fameuse promenade 6 voies du Malecón à La Havane) afin que puissent les utiliser à loisir les grosses voitures américaines de l'époque, Cadillac DeVille et autres Buick Roadmaster ou Chevrolet Styleline, sans risque d'égratigner pare-chocs ou aile. Sous le régime castriste, faute de carburant - importé du bloc soviétique jusqu'en 1990 - et faute de pièces de rechange, les somptueuses voitures eurent bien du mal à survivre, engendrant un petit commerce de pièces détachées (ci-contre, avec des arguments particuliers...), avant d'être plus ou moins délaissées, voire abandonnées. Sur le ouèbe, on peut voir une Mercedes 300 SL bien abîmée après une rencontre avec un bananier qui passait par là (ne vous précipitez pas, elle n'y est sans doute plus à c't'heure...).On estime que 2/3 du parc automobile actuel est constitué par des américaines des années 50. Maintenues en état à grand frais et avec des trésors d'ingéniosité, elles sont souvent utilisées comme taxis collectifs ou à l'occasion d'un mariage ou encore louées en "voitures de ville" par les touristes. Dans les années 70 et 80, apparaîtront les carrosses soviétiques de Lada et Moskvich toujours plus ou moins en usage aujourd'hui, bien que l'importation de voitures d'autres origines ait été autorisée depuis janvier 2014. Malheureusement, elles font le désespoir des clients potentiels car affichées à des prix astronomiques de plusieurs dizaines de milliers de dollars. C'est énorme dans un pays où beaucoup de choses sont gratuites - services de santé, éducation scolaire, certains loyers, études de médecine, subventions alimentaires - mais où la moyenne du salaire mensuel d'un Cubain est de... 20 dollars !
Moins gourmandes en carburant et plus faciles à entretenir - les pièces de rechange transitaient discrètement par le Canada, y compris celles pour les Harley- Davidson - les motos ont mieux survécu. Toutes importées, comme les automobiles, elles eurent quand même à souffrir de la disparition progressive des principales marques anglaises qui fournissaient le gros du parc motocycliste cubain avec, évidemment les deux "yanquis" Harley et Indian, jusqu'à la disparition de cette dernière.
Les publicités motocyclistes de l'époque précédant l'embargo décrété par les États-Unis présentaient le haut de gamme de la production européenne. Parmi les machines qui ont été préservées, il ne semble pas que figurent des Ariel 4 cylindres, pas plus que des B.M.W. pourtant réputées indestructibles.
Tout le paradoxe de Cuba symbolisé par une photo : l'étendard frappé de l'étoile aussi castriste que révolutionnaire, planté sur le symbole le plus mondialement connu du capitalisme étasunien, la Harley-Davidson ! L'ensemble est cependant rendu moins explosif par la grâce d'une jeune personne qui fait honneur à la réputation de beauté des Cubaines. Sans remonter à la première de la famille à hériter du surnom de "bombe H cubaine" - la Chelo Alonso de notre adolescence (inoubliable dans Maciste contre le Cyclope ou la Terreur des Barbares) - on citera aujourd'hui Eva Mendes ou Vida Guerra...
Une autre Harley beaucoup moins "glamour" que la précédente car transformée en utilitaire bonne à tout, marchandises ou voyageurs (Il s'agit peut-être d'un Servi-car H-D transformé). Quoiqu'il en soit, c'est très apprécié dans un pays qui manque cruellement de transports publics. BedinCuba est un site (officiel ?) qui, comme le nom l'indique, fournit d'abord aux touristes des adresses d'hôtels ou de logements chez l'habitant. En outre, il fait de la publicité pour les monuments, quartiers typiques, musées, etc, et aussi pour les voitures et motos anciennes qui se rencontrent un peu partout, surtout dans les villes, et qui sont devenues des sujets d'attraction.
Dans une version nettement plus confortable, le Servi-car Harley-Davidson retrouve une fonction noble et fructueuse : balader les touristes comme font les fiacres à Marrakech ou les traineaux en Autriche (Photo : radiorebelde.cu)
La société Poderosa Tours présente deux originalités propres à Cuba : A - Elle loue des Harley aux touristes et organise des voyages pour eux (encore tout pour l'étranger, mais c'est une importante source de devises pour le pays). B - Elle compte parmi ses trois fondateurs un certain Ernesto Guevarra - le fils de - photographié ci-dessus. D'où le nom choisi de "Poderosa", surnom de la Norton du Che dans le voyage que l'on sait. La machine personnelle du fiston est une Panhead des années 60, alors que le catalogue des machines proposées à la location comporte les derniers modèles du constructeur de Milwaukee, y compris la V Rod. Ce qui tendrait à prouver que tous les Cubains ne vivent pas avec seulement 20 dollars mensuels. On suppose que dans cette affaire, pour le bien du tourisme on s'est assis sur l'embargo, autant du côté cubain que du côté américain...
Voyageur impénitent, l'ami Lapin en visite à Cuba n'est pas resté insensible au charme d'une latérales de 1947. Il est toujours équipé de son stylo "fish-eye" qui lui permet de faire tenir les plus larges sujets dans les limites de son habituel carnet de dessins (ici un livre de comptes, d'où les filets des colonnes en rouge). Son livre sur Cuba est dans toutes bonnes échoppes sous le simple nom de "Lapin à Cuba".
Au milieu des années 40, Gonzalo Bernardo Alonso Fernández venu de sa Galicie natale (Espagne) avait ouvert un atelier de réparations de motos à La Havane. Il participait à des courses routière au guidon d'une Indian qu'il modifiait progressivement à son idée. Un jour, il eut l'occasion de se frotter à une Vincent et à plusieurs Harley. Il les battit toutes, ayant arraché la victoire dans le sprint final grâce à sa position "à la Rollie Free". Intéressé par la performance, la Rogers International de Cuba (importateur Indian), lui offrit son soutien. Gonzalo Bernardo y etc se mit alors à "travailler" sérieusement son Indian. Elle devint la machine de el Gallego (le Galicien), célèbre dans toute l'ile par ses multiples victoires. La cylindrée atteignait 1300 cm3, le cadre venait d'un modèle de 1928 et la fourche fut changée pour la plus légère parallélogramme de l'Indian Scout. Avec d'autres pistons (Borgo) et carburateur, elle frôlait les 200 km/h... En 1952, el Gallego partit en Espagne, puis retourna à Cuba, en 1956. Indian avait disparu et d'autres champions avaient pris sa place en haut des palmarès de la compétition. Son Indian n'était plus dans la course, alors il la remisa devant chez lui, enchaînée à la grille d'une fenêtre. Elle y était toujours au début des années 2000 lorsque Onelio Garcia Pérez vint recueillir ses souvenirs qu'il publia sur son site hobbiesenred.havanatrends.com (dont ce texte s'est inspiré). El Gallego avait alors 89 ans et des idées assez claires et définitives sur les motos modernes : "Aqui ya no hay motores, es una mierda". On se passera de la traduction...
Les spécialistes du "militaria" connaissent bien le Cushman parachuté en 1944 et dont quelques exemplaires furent réutilisés ensuite en Indochine par l'armée française. Le modèle civil était beaucoup plus habillé, tel celui-ci de la Serie 50 ou 60 fabriqué de 1946 à 1952 (+ ou -). Avec son 250 à soupapes latérales et son embrayage centrifuge et deux vitesses, il ne ferait pas si mauvaise figure encore aujourd'hui (Photo bedincucba.com)
Attention les yeux car maintenant on tombe dans le "bizarre" avec une spécialité typiquement américaine du nom de Whizzer. Ce gros vélo a un moteur à soupapes latérales (cylindrée ?), monté comme s'il s'agissait d'un adaptable des années 1900. Ce qui pourrait bien être le cas de celui-ci. (Doigt dans l'œil me suis-je mis ! D'après Jackymoto c'est du letton ! Voir commentaires)
Voici un Whizzer "true blood american" dans une tenue immaculée. La frêle fourche télescopique est bien d'origine tandis que le guidon adopte le style "hi rider" propre aux choppers. La transmission finale à courroie est la signature des Whizzer presque depuis les débuts de la marque qui remontent à 1939. Elle a commencé à battre de l'aile au milieu des années 50 avant de se tourner vers la fabrication de jouets. Vers 1997, une fabrication portant le même nom refit surface, proposant le "New Whizzer" et des pièces de rechange pour tous les modèles. Il semble que depuis les Chinois soient entrés en scène...
(À SUIVRE : On retourne à Cuba !)
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C'est chaque fois pareil, à peine un article est-il publié qu'on retrouve de nouvelles photos qui auraient pu l'illustrer en le complétant ! Les voici donc.
9 avril 1939 : dans une rue non identifiée de la région parisienne, rassemblement de motos réquisitionnées. Principalement des Terrot latérales et aussi un sidecar dont on aperçoit le pare-brise vers le milieu de l'alignement. Le Garage Renault, à droite, devait être le point de ralliement, ce qui explique aussi la présence de taxis Renault G7 en cours d'examen avant d'être déclarés "bons pour le service". Sur deux ou quatre roues, l'armée française n'avait pas été très prévoyante, pas plus qu'en 1914...
Encore une belle moto dont la réquisition a dû fendre le cœur de son propriétaire. Il est vrai qu'une René Gillet 1000 (ou 750) à suspension arrière devait attirer l'attention dans la rue, autant par sa technique que par son prix. Elle se classait parmi les "plus de 7 000 F", à l'égal des 500 françaises et étrangères, monocylindres mais à soupapes en tête.
La 350 Peugeot P135 Grand Sport, machine du "120 à l'heure" , fut produite en petite quantité dans une version militaire (peinture). Mais elle était privée de grippe-genoux et sans les échappements relevés, un supplément de la version "haut Luxe". Celle-ci serait donc plutôt une "civile" revisitée par la Wehrmacht. (Dernière heure : un lecteur me signale qu'il s'agit d'une "Grande puissance" 515 ou 415...)
Par l'inspiration des fresques traditionnelles qui ornent ses murs, une salle de garde militaire vaut bien une salle de garde d'hôpital ! (carte postale d'époque)
Valait-il mieux finir au fond de l'Océan où quelque part dans la campagne française ? Dans les deux cas, le résultat est le même, mais quelques Indian renaîtront après la guerre, reconstruites par des passionnés ou des spécialistes sevrés de mécaniques américaines. Il en sera de même avec les Harley-Davidson beaucoup plus nombreuses, débarquées à partir de 1944 et qui alimenteront les "surplus" mis en vente dans les années suivantes.
La moto est une BSA anglaises, mais les corps sont ceux de Français morts au combat, probablement dans la région de Dunkerque, là où se rassemblaient les troupes en vue du rembarquement vers l'Angleterre. En bas à gauche, un fusil-mitrailleur Type 24-29.
Quelques carcasses de motos et sides, quatre casques français et une sobre inscription sur une barrière symbolique : "Respect aux morts"... (Document Frera)
(À suivre)
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Certaines des illustrations figurant dans cet article ont été utilisées dans mon livre "Les Motos des Français - Un album de famille 1945-1970" paru en 2002 (Épuisé)
Le 9 septembre 1945 se couraient les Coupes de Paris organisées par l'A.G.A.C.I. dans le Bois de Boulogne. C'était la première épreuve de vitesse en région parisienne depuis la Libération, mais c'est le Circuit de Saint-Cloud du 9 juin de l'année suivante qui a conquis la gloire aux yeux du souvenir. Mis sur pied à la hâte, le premier nommé n'a pas eu l'aura du second qui était patronné par Paris-Presse et L'Equipe avec, selon une belle affiche de Geo
Ham, "le concours de l'A.M.C.F. et du M.C.C." (Association Moto-Cyclecariste de France et Moto Club Clodoaldien). Un libellé qui situait assez bien la place des uns et des autres.La réunion de St-Cloud avait tout d'un rassemblement mondain honoré de la présence du général Jean De Lattre de Tassigny, bien connu pour son goût d'une certain decorum (il était surnommé "le Roi Jean"). Il tenait beaucoup à l'excellente tenue des hommes sous son commandement et s'il était dans la tribune d'honneur dressée presqu'à l'entrée du tunnel de l'autoroute de Saint-Cloud, ce n'était pas par amour de la moto mais pour encourager l'un des anciens de sa 1ère Armée. Celui-ci, Jacques Charrier fervent motocycliste, était rentré d'Allemagne après la capitulation avec une moto dans ses bagages, rien moins qu'une B.M.W. 500 à compresseur. Comme souvenir, c'était mieux qu'une baïonnette, un fanion, un casque, voire une grenade à manche. Mais c'était sans doute tout aussi dangereux à manipuler. À Saint-Cloud, il termine 11ème des 14 classés... Pudiquement, Moto Revue dans son reportage le mentionne dans une catégorie à part des "Motos 500 à compresseur". Il y figure tout seul, et pour cause ! (voir les commentaires en fin d'article).
À l'arrivée, point de photo de la B.M.W. à compresseur mais la performance de Marcel Perrin sur 250 Excelsior ACT fur remarquée et honorée comme on voit en présence du général De Lattre de Tassigny. Tout à droite, Eugène Mauve, membre de l'organisation inaugurait ses légendaires culottes de golf. Concernant la B.M.W. de Charrier, la dernière fois qu'elle a fait l'actualité, elle était dans les mains de John Surtees, désireux de connaître son pedigree français. Mais je crois qu'elle a beaucoup voyagé depuis...
Une partie du succès du Circuit de Saint-Cloud tient pour une part à l'inclusion dans le parcours d'une portion de l'Autoroute de l'Ouest, une grande nouveauté encore même en 1946. Y compris pour ceux qui ne l'avaient jamais parcouru, faute de véhicule adéquat. Décidée en 1935, la construction de cet autoroute (premier et unique en France, rappelons-le) fut interrompue en 1941. Une partie fut ouverte à la circulation en direction du nord, après la déviation qui mène à Vaucresson ou Versailles desservie par le pont situé à l'arrière-plan. L'absence de tout véhicule indiquerait que cette photo a été prise (dos à la capitale) dans la partie à demi-terminée et située entre le tunnel et le pont. L'autre photo, en ouverture de l'article, aurait été faite du haut du pont, en direction de Paris dont on distingue la Tour Eiffel dans le lointain et... une moto dans le bord gauche !
Le tunnel ouvrant l'accès à l'autoroute était occupé par les troupes allemandes. Elles y entreposèrent des explosifs, dont des torpilles de la Kriegsmarine destinées à la destruction de Paris (les ponts, en particulier). Il s'est dit que de nombreux édifices de la capitale avaient été minés, mais jusqu'à présent aucune traces ni témoignages de ces méfaits n'ont été découverts. La photo représente la sortie en direction de la province avec une circulation à double sens dans un tunnel "simple", devenu "double" aujourd'hui.
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AVANT L'OCCUPATION DE LA FRANCE, LA GUERRE !
En 1946, la moto de Jacques Charrier avait fait forte impression sur les foules, mais sans doute moins que celles qui avaient brutalement déferlé sur la France après l'incertitude créée par la "drôle de guerre". Durant de longs mois, l'armée française était restée sur ses positions défensives consciente de sa force derrière la ligne Maginot ("On ira pendre notre linge sur la ligne Siegfried" chantait Ray Ventura et ses Collégiens). On attendait donc l'ennemi sur une ligne de front comme en 14. La surprise du 10 mai 1940 en fut d'autant plus grande de voir arriver cette armée mécanisée à l'extrême et si rapide pour contourner nos positions. La stratégie de la "blitzkrieg" élaborée à la fin de la première guerre prouvait son efficacité. Parmi les chars et les automitrailleuses circulaient les chiens de garde motocyclistes sur des machines dont la plus emblématique était la fameuse B.M.W. culbutée 750 R 75 attelée, ou encore la 750 R 12 latérales. À leur côté, en liaison ou en avant-garde se trouvaient les motos solos ou sides d'à peu près tout ce que l'Allemagne comptait de constructeurs de deux-roues en plus de B.M.W. Ils étaient nombreux et présents dans toutes les cylindrées, de 125 cm3 (voire 100) à 800 cm3 dont la prestigieuse Zündapp 4 cylindres. Mais l'ennemi dans sa marche en avant accélérée allait aussi récupérer tout deux ou trois-roues qu'il trouvait en état de marche, abandonnés par nos troupes vaincues ou en déroute.
Flat-twin oblige, l'Allemand semble avoir particulièrement apprécié nos Gnome-Rhône. On les comprend lorsqu'ils les trouvaient dans cet état, seulement vidées des munitions et des équipements contenus dans le coffre des sidecars. À en juger par la position de ces deux attelages encore bien alignés, leurs pilotes n'ont guère eu la possibilité de réagir.
Prises de guerre, les Gnome-Rhône reprirent vite du service. Et assez longtemps puisque sur quelques sites ou blogs consacrés au militaria, on voit que certaines ont été en opérations jusqu'en Ukraine, après la rupture du pacte germano-soviétique.
Le "feldgrau" de base était aussi fier de prendre la pose sur une machine prise à l'ennemi que s'il avait piloté une production de Munich ou Neckarsulm.
Les rares Indian qui avait survécu au naufrage du navire qui les transportaient en France n'eurent guère le temps de démontrer leur potentiel. Mais elles aussi...
... reprendront du service sous d'autres couleurs et avec d'autres pilotes.
Quelques mois plus tard, on verra des Indian dans nos colonies ou dans des pays sous mandat français. C'est ainsi qu'en 1941 le Bataillon de marche de l'Oubangui-Chari participera à la campagne de Syrie (juin-juillet) menée par la France Libre.
Les René Gillet ont laissé de nombreuses traces de leur utilisation durant le conflit. Sans doute parce que la marque de Montrouge a fourni le plus de machines à l'armée française. Elles ont connu des situations bien moins paisibles que celle représentées ici pour les besoins de la propagande (photo parue dans Match - 1940).
Ensuite, les photographes seront plutôt les soldats allemands. Aujourd'hui, on trouve tellement de photos de ce genre que c'est à croire qu'ils avaient tous un fusil dans une main et un appareil photo dans l'autre !
Certains avaient même un certain sens de la mise en scène comme en témoigne cette "nature morte" avec un casque français (troué) posé sur la selle d la René Gillet.
En Tunisie, alors sous protectorat français, les troupes de la France Libre étaient alliées aux Américains et aux Britanniques. Elles participèrent aux combats contre les Italiens et les Allemands. Ce sidecar René Gillet, probablement de l'Armée d'Afrique, était armé d'un fusil-mitrailleur modèle 24/29 que certains d'entre nous ont connu...
De la 250 cm3 deux-temps à la bicylindre en V latérales 750, Terrot étudia plusieurs type de machines répondant (avec plus ou moins de bonheur) aux exigences de l'armée. Quelques marchés portant sur de petites quantités furent passés, mais semble-t-il sans conviction de part et d'autre. La plupart du temps, ce sont des motos civiles de réquisition que l'on trouvera aux mains de nos soldats en campagne, comme cette culbutée (250 ou 350 ?) à la sommaire immatriculation militaire et sur laquelle le chrome n'avait pas été économisé.
L'apport essentiel de Terrot à ses machines de Type A (Armée) réside dans ces roulettes destinées à faciliter le passage des bosses en terrain varié. Ces A (monocylindre) présentaient en outre un cadre moins long afin d'être plus maniables. Dans les essais dit "d'évaluation", les militaires exigeaient la présence d'un passager, sinon la moto n'offrait pas plus d'avantages que le cheval... qui resta leur favori jusqu'en 1939, malgré les multiples cris d'alarme d'un certain Colonel De Gaulle partisan de l'arme blindée !
L'armée française "pensait" tellement cheval que la tenue du motocycliste en porte la trace dans ces leggins cavalières qui semblent avoir connu le premier conflit mondial. L'équipement plus spécifique composé d'une veste (parfois en cuir) avec pantalon en grosse toile imperméable n'apparaîtra que plus tard.
En fait de Terrot Type A, certains durent se satisfaire d'une plus modeste 175 deux-temps.
Bottes bien cirées, uniforme impeccable, voici un futur "occupant" heureux sur une non moins belle Terrot latérales qui n'a même pas encore changé d'immatriculation.
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UNE ARMÉE FRANÇAISE EN TROMPE-L'ŒIL
Sitôt l'armistice signé en juin 1940, le gouvernement de Vichy décida la création de Chantiers de Jeunesse (juillet 1940). Encadrés par des officiers d'active ou de réserve, les Français en âge de faire leur service militaire furent rassemblés dans des camps sur différents points du territoire. Dans une ambiance moitié scoute, moitié militaire, il devaient effectuer des travaux divers, principalement forestiers. Il y eut aussi un Établissement hippique des Chantiers. Le but était de maintenir un semblant d'armée française, tout en occupant une jeunesse à tout le moins désœuvrée et qui pouvait s'avérer "turbulente". L'esprit de l'opération est bien présent sur les affiches (ci-dessus) qui mettront à contribution tout les héros de la mémoire collective des Français : le maréchal Lyautey, Guynemer, Bayard, Saint Louis ou Vercingétorix. Ce dernier a l'avantage de manier une hache à double tranchant, arme supposée des Gaulois, qui fournira un symbole repris par Pétain. Il en fera une décoration - la Francisque - qui, pour certains récipiendaires, perdra beaucoup de son rayonnement à partir de 1944...
Pour occuper des jeunes gens pleins d'enthousiasme, quoi de mieux que la mécanique, et qui plus est la mécanique motocycliste. Dans cet atelier non-situé (Isère ?) sont rassemblées des motos "civiles" ou réquisitionnées. Aussi quelques militaires en voie de guérison comme la Gnome-Rhône à gauche portant une double immatriculation.
Remise à neuf ou trouvée telle quelle, une René Gillet attelée est une bonne occasion de s'amuser entre copains. Mais c'était peut-être, plus sérieusement, pour l'essayer afin d'en apprécier les performances...
Tellement tendance aujourd'hui, la "kustom kulture" n'est vraiment pas une nouveauté. Et cette malheureuse Gnome-Rhône Major 350 latérales en a fait les frais il y a 3/4 de siècle !
(À suivre, bien sûr...)
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Régulièrement l'interdiction du stationnement des motos sur les trottoirs parisiens est à l'ordre du jour. Il doit en être de même dans les autres grandes villes de province - vous avez remarqué, on ne dit plus "en province", on dit "en régions", comme si province était devenu un mot péjoratif, comme le paysan qui est aujourd'hui exploitant agricole... Est-ce qu'à l'école, lorsqu'on demande à un petit Auvergnat la profession de son père il répond "exploitant agricole" ? - Bon, revenons à la moto... Béquiller sa machine sur le trottoir, c'est pas bien (pourtant les anglaises incontinenentes ont disparu. Wouaf !), on le sait, mais comment faire autrement alors que dans la capitale il y a 150 000 deux roues en circulation pour 40 000 places !
On reparle donc de réprimer une pratique selon un rituel qui revient à la surface depuis des décennies. C'est avec la renaissance de la moto, vers les années 80, que le problème a commencé à se poser à nos édiles municipaux. Et aussi policiers car à Paris c'est au Préfet de Police de régler ce stationnement qui lui colle aux pattes, tel le sparadrap du Capitaine Haddock.
Dernière décision en date, le 13 mars 2008, une note du Préfet Michel Gaudin enjoignait à ses agents de tolérer les motos sauf : aux entrées d'immeubles ; au droit des bouches d'incendie ; sur les pistes cyclables ; au droit des passages piétons. Il précisait aussi de "faire preuve de discernement dans l'action de verbalisation".
En remontant le temps, on trouve des décisions semblables, émanant toujours du Préfet en place. Janvier 1995 : Philippe Massoni annonce au Conseil de Paris "une sévérité accrue des forces de police contre les deux-roues qui confondraient la rue et les espaces qui restent encore au piéton" (Libération, 4 janvier 1995). Pas avare de contradictions, le même Philippe Massoni souhaitait en février 1994 "... qu'il y ait davantage de deux-roues et moins de voitures. On circulerait beaucoup mieux".
En juillet 1991, on apprenait que "La chasse aux deux roues va être ouverte dans la capitale" (Le Monde, 10 juillet). Selon le Préfet Pierre Verbrugghe :" Leur stationnement anarchique sur les trottoirs, dans la rue et les zones piétonnes nécessite le recours à des enlèvements adéquats". Il demande donc à passer un marché avec les entreprises spécialisées dans l'enlèvement de ces véhicules.
La question ne va pas trouver de solution instantanée, mais il y a un point sur lequel nous pouvons agir : celui du respect de quelques règles de bon sens que beaucoup méprisent souverainement. Exemples de ce mépris, récoltés au hasard de déplacements dans Paris.
Sous le porche de l'Hôpital Rothschild (rue Santerre, XII ème). À l'arrière-plan se trouve un parking réservé aux motos... Mais c'est loin, de l'autre côté de la rue...
... alors que sur le parvis, à quelques mètres, se trouve ce panneau d'interdiction.
Bandes blanches délimitant l'emplacement, empiètement sur le trottoir : illustration du style "Je-suis-garé-comme-une-merde,-ça-vous-dérange ?". Sans vouloir dénoncer, c'est un 125, probablement sans permis-moto...
Pour moi c'est l'imbécilité à son sommet, la plus parfaite. Et aussi la plus dangereuse, pour lui et - surtout - pour les autres. 1er temps : il s'arrête pour téléphoner. 2e temps : son copain arrive, en voiture et se gare près de lui. 3e temps : deux sublimes connards en pleine discussion (cliquer sur l'image pour mieux les admirer).
Devant l'entrée de l'Hôpital Tenon (côté avenue Gambetta)
Comme disait une publicité B.M.W. : "Montre qui tu es".
À côté de chez moi, il est resté sans bouger de place pendant tout un mois de vacances en août/septembre.
Celui-ci, je l'aime bien, il a frôlé le premier prix, mais il y a eu le "téléphoniste" du carrefour. S'arrêter là aussi pour téléphoner (la vérole du XXIe siècle !), et à contre-sens de la circulation ! C'est comme ça que le deux-roues se fait une bonne réputation...
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ON A REÇU ÇÀ :
"Un membre anonyme (ndlr : si peu anonyme...) de la Confrérie des Vieux Clous de Lambersart (que nous appellerons le Motocycliste masqué) a décidé, afin de soutenir l'action pour la sauvegarde du Musée de Maurice Chapleur, de faire la liaison Lille / Lunéville à motocyclette avec une belle machine française de 1937.
Voici le programme : Aller le samedi 19 septembre. Repos à Lunéville le dimanche 20. Retour le lundi 21.
Ce sera le week-end du Patrimoine , quoi de mieux pour dire une fois de plus ... qu' une Motocyclette, aussi ancienne soit elle, est faite pour rouler !
J'en profite pour vous signaler qu'elle arborera cette plaque que l'on peut se procurer à la FFVE".
Profitons sans vergogne du malheur des autres ! Demandons l'installation de la Collection Chapleur dans les salles laissées vacantes par le spectaculaire incendie de 2003 qui a ravagé la chapelle et la partie des anciens appartements princiers occupés par le "Cercle militaire" (késaco ?).
Au prix d'importants travaux, et de plusieurs millions d'euros (100 estimés), la chapelle a pu être débarrassée du "parapluie" qui la protégeait des intempéries. Mais il reste encore beaucoup à faire pour que le château retrouve sa splendeur héritée du 18 ème siècle.
On voit pointer à droite le "parapluie" qui a coiffé la chapelle pendant toutes ces années, gâchant l'exemplaire symétrie architecturale de ce château inspiré par Versailles.
Deux photos qui donnent une idée de l'importance du travail réalisé dans la chapelle. À droite, l'état de la charpente du dôme, en cours de reconstruction (2008), et à gauche l'état presque actuel (2010), mission terminée.
Les sous-sol du château ne sont pas moins bien traités que les parties plus "nobles". Il n'y manque que quelques belles et anciennes motos pour meubler...
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ON S'ÉPOUVANTE PEUT-ÊTRE UN PEU VITE des possibilités attribuées aux réseaux internet de tout poil qui nous cernent. On dit qu'ils arrivent à déterminer notre personnalité, nos goûts, nos envies, nos sentiments et autres secrets qui nous sont ô combien personnels ! Ils nous "ciblent" aux fins de nous vendre tel ou tel produit, grâce à de savants calculs extraits des milliards d'informations que livre un ordinateur. Résultat : sur votre écran apparaît soudain un flash qui vous dit "Monsieur Machin nous avons trouvé exactement ce que vous souhaitez". C'est ainsi qu'on m'a proposé un soutien-gorge grande taille (Damned ! je suis démasqué, il va falloir que je trouve un autre costume pour la gay Pride !). Plusieurs fois on a voulu que j'achète une voiture puis c'était une carafe à vin blanc Villeroy & Boch à 39 € (je ne bois que du rouge), bref, tout un lot de bidules qui me laissent froid, mais qui pourraient m'intéresser car d'usage courant, sauf le soutif ! (soyons sérieux). Là où je reste coi, c'est devant le casque (photo ci-dessus) façon Wehrmacht "fait pour vous" qui m'a été proposé via Ebay ! "Ils" connaissent peut-être mes goûts dans les coins, mais ils ne lisent pas ce blog car ils sauraient un peu mieux ce que je pense et écrit sur le "militaria". En plus, ce casque à l'esthétique orientée est "vintage", vraiment tout ce que j'aime... Dans un sens, c'est réconfortant. Ça prouve que les machines peuvent se tromper. Mais, que sait-on de l'avenir avec les robots "intelligents" qu'on nous promet ?
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AVANT L'HEURE, C'EST PAS L'HEURE ? Il y a déjà quelques années, lorsqu'on a doté les ouvriers du bâtiment et du BTP (autoroutes, DGSE comprises - voir commentaire ci-dessous) de vestes orange ou vert fluo, de bonnes âmes protestèrent, prétextant qu'on humiliait ainsi le prolétaire en l'obligeant à s'habiller "comme un clown". À voir ce qui nous entoure aujourd'hui dans nos rues, le clown a gagné ses lettres de noblesse. L'orange fluo, le vert/jaune de même, sont partout : collants, lacets de baskets, soutiens-gorges (t'imagines le string assorti...), pantalons et leggins, robes, imperméables, bonnets, T shirts. J'ai même vu un superbe "van" Mercedes noir avec rétros, calandre, entourages des phares en orange fluo. Peut-être un employé d'une autoroute ? Lorsque ce fameux gilet fluo a été imposé aux automobilistes, c'est passé dans l'indifférence générale. Peut-être grâce à l'effort de notre Teuton parisien, toujours ganté de ses mitaines cuir "biker" (photo), et même si, selon une gazette, il n'a jamais porté le gilet qui a été "photoshopé" sur lui, du moins son visage. Pour les motards, ce fut moins bien accepté. Gros vacarme avec manifestations tous azimuths, blocage du périphérique parisien, campagne dans la presse spécialisée, etc. Abandonnée par la porte, l'obligation revient par la fenêtre. Avec cependant un bémol : on endossera la chasuble seulement en cas d'arrêt sur le bord de la route pour accident, par exemple ou une autre cause. Rien n'est dit sur la "pause pipi" dont on sait pourtant qu'en cas d'urgence on n'a souvent pas de temps à perdre pour endosser la chose obligatoire. En plus, ça ferait tomber la moyenne. Par pudeur, on ne s'étendra pas sur le cas de l'éventuelle passagère... Sans me vanter, repousser cette obligation de chasuble fut une erreur monumentale. Le monde motocycliste a perdu ainsi l'occasion de lancer une mode, que dis-je, être à l'avant-garde de la mode ! Cependant, une question me taraude : maintenant que plus rien ne va nous distinguer du commun des mortels, "ils" vont inventer quoi pour nous rendre plus visibles ? ! ? !
(N'allez pas me dire que vous auriez honte d' une passagère qui serait vêtue de fluo comme celles choisies au hasard du ouèbe que je vous montre ci-dessus ?)
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LE COMMERCE DU LUXE FAIT UN MALHEUR à travers le monde, jusqu'à Pondichéry d'où Jacky Pichaud a rapporté ce document doublement exceptionnel. D'abord c'est un scoop qui nous apprend que Rolex la célèbre marque suisse va se lancer dans l'hôtellerie, sans doute en "low cost" pour commencer. Ensuite et deuzio, il prouve que cette maison teste ses fabrications horlogères de façon extrêmement sévère en se livrant à des essais de résistance grandeur nature. On voit ici un essayeur qui va se lancer sur les routes de புதுச்சேரி (c'est Pondichery en tamoul) avec un chargement de montres protégées comme des œufs. Il s'agit effectivement d'une série de Rolex d'un modèle dénommé "GOLDEN EGG" (Œuf doré) introduit dans les années 50. On espère pour le pilote de ce deux-roues est bien payé, sinon quelle tentation d'aller se faire cuire une ... omelette !
À son envoi, Jacky a joint cette image venue d'un site spécialisé dans les photos "fun", riche au rayon "motorcycles" d'images faites dans le Sud-Est asiatique. En ces pays, la machine à deux roues est un moyen de transport collectif et "collectif" ça veut dire entre 3 et 6 personnes à la fois !
Pour les marchandises de toutes sortes, le moindre support est utilisé, ne laissant qu'un bout de selle à la passagère. Mais lorsque le colis est trop encombrant...
... la solution devient radicale, ajoutant cette 37ème position à celles du Kama-Soutra déjà acrobatiques (photo : heapsoffun.com). Avec de tels comportements (!), pas étonnant que dans un pays comme la Thaïlande, à peine plus peuplé que la France, on déplore la mort de 26 000 motocyclistes. Mais il y en a qui ont connu une mort plus douce que d'autres...
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DANS L'ARTICLE VINTAGE (4), il était question de la famille Coste et du papa Didier qui se partage entre le cyclecar et la moto. Le voici dans ses œuvres, tel que photographié il y a déjà quelques années (vu sur Instagram ?). "Ça passait, c'était beau !" ...
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Comme on en prend pour deux ans (putain... ! deux ans !) en attendant 2017, il faut faire des réserves de souvenirs, que voici donc en quelques photos.
Plaisir de voir une nouvelle Monotrace sur ses 2 roues + 2, différente de celle du Musée de Rochetaillée. Malheureusement, il m'a semblé la voir revenir sur le camion-balai à la fin d'une série. Au premier plan, une Griffon bicylindre à moteur Zedel avec son original allumage-magnéto à l'abri dans le réservoir.
Au terme d'années de labeur et de méticuleuses recherches des pièces d'origine, Didier de La Dessa présente une impeccable Gladiator (pas Clément, il y tient car sur le couvercle de l'allumage, on peut effectivement lire : "Moteur Gladiator - Licence A. Clément"). La clé à œil faisant office de démonte-pneu fixée sur la sacoche contenant la batterie est une petite merveille à elle seule (Photo et la suivante par moto-collection.org).
Ce moteur, sous ses différentes versions intéressa plusieurs autres marques dont Clement-Garrard en Grande-Bretagne et Columbia aux États-Unis. En France, il figurait aussi au catalogue Aiglon en 1902 (Emile Debaralle à Argenteuil).
L'Espagne n'était pas moins enthousiaste et cette annonce d'un journal de Barcelone utilise abondamment les résultats en compétition du culbuté (seulement à la soupape d'échappement) Clément. La vérité oblige à préciser que les records dont il est question, en vitesse pure sur le kilomètre ou le mile, était obtenus avec le Clément bicylindre en V (aussi cà culbuteur), mais nettement plus puissant avec ses 570 cm3.
Jean-Pierre Pradères et sa Velocette MAC compé-client de 1939 dans le rôle de "l'arroseur arrosé". En effet, on le voit plus souvent l'œil collé au viseur d'un appareil-photo que devant l'objectif. Mais l'attrait de Montlhéry est puissant, même sur ceux qui sont "dans le métier" depuis longtemps.
Magnifique témoignage de l'âge d'or de la moto de course française, la 350 Koehler-Escoffier GP de 1936 (Collection Bayssat). Œuvre de Raymond Guiguet et Marcel Château, ce moteur à arbre à cames en tête 350 ou 500 cm3 remporta dans les années 30 de nombreux titres en Championnats de France grâce au talent des Monneret (Georges), André Jarrot et autres André Barthe ou Marcel Perrin.
Victime d'un gros malaise et crachant son huile à l'entrée du goulet menant à l'anneau, La Mondiale 1928 aussi belle que belge n'aura eu que peu de temps pour mettre en évidence les performances de son JAP "Racing" (Collection Vanaekelbergh).
Sous des allures qui inspirent pourtant plus la robustesse que la compétition, La 350 F.N. M60 Sport est une culbutée que son pilote mène avec une énergie rare, s'agissant d'une grand mère nonagénaire. La présence de freins à tambour en place de patins sur poulie-jante est une entorse faite à l'origine pour raisons de sécurité (Collection HD Classic Team).
Pas de réunion d'anciennes sans Nougier ! Cette 500 double ACT (pilote Claude Caucal) est la seule incursion du génial mécanicien de St-Andiol dans la catégorie des demi-litre. Ceci en moncylindre, faut-il le préciser, car il existe une certaine 4 cylindres !
Impressionnante "Best After Test" (BAT) avec son gros JAP culbuté de 1000 cm3 et une sommaire fourche avant suspendue. Mais en 1913, sa date de naissance, on ne se souciait guère de tenue de route car le mot d'ordre c'était "tout pour la vitesse !" (Collection Hockenheim Museum).
Le bénévolat a tout de même ses limites, et un p'tit somme au bord de la piste ne fait pas de mal lorsque le patron regarde ailleurs ! (Photo : theautomobilist.fr).
Une photo rare de Frank Chatokhine (Triumph 500 Speed Twin de 1938) au repos quoique sans doute bouillonnant intérieurement, au premier rang sur la ligne de départ de sa série. La 500 Panther 1928 (Collection Baumgartner) à son côté, de 10 ans plus vieille que la Triumph, s'apprête néanmoins à mettre du gaz, même si c'est à un autre niveau.
Hormis le casque (obligatoire), pas une faute de goût dans le costume d'Olivier Iacconi, pas plus que sur sa machine une Styl'son RK 500 de 1929 à moteur Blackburne culbuté.
La Famille Coste est tombée depuis longtemps dans le chaudron de la mécanique britannique, que ce soit en deux roues (Norton), trois roues (Cyclecar Morgan) ou même quatre roues (Jaguar XK 120 ?, 140 ?, 150 ?). Pendant que Dimitri se livre aux joies du dirt-track (BSA), et de la vitesse (Norton), Didier, le père, s'arsouille sur une autre Norton Course de 1933.
Vue dans le parc mais pas sur la piste (?), une très belle Scott, l'historique deux-temps anglaise. Ses solutions techniques, twin, refroidissement liquide, graissage mécanique, changement de vitesses au pied (dès l'origine), ne feront pas école dans son pays.
Jean-Luc Gaignard nous offre à chacune de ses apparitions le plaisir de voir rouler des machines exceptionnelles de sa nombreuse collection riche en motos et voitures. À Montlhéry, il jouait sur les deux tableaux. Sur quatre roues dans une Silver Hawk 1480 cm3 ACT de 1920 et en moto sur le seul exemplaire connu de 500 Koehler-Escoffier bicylindre en V à culbuteurs de 1912.
Bien que "simples" culbutées mais robustes, les Saroléa 350 ou 500 s'opposaient avec succès à des anglaises plus rapides mais parfois plus fragiles. Malgré des caprices d'embrayage, la 350 de Philippe Guijarro a fini par céder à la volonté de son pilote qui avait reçu l'aide de ses amis mécanos bénévoles !
M.M.C. (Motor Manufacturing Company) établie à Coventry représentait le tri De Dion puis entreprit de les construire ainsi que les "Motocyclettes" Werner. C'est l'une de ces dernières, une 180 cm3, que présentait l'équipe de Yesterdays, le spécialiste néerlandais en motos classiques. Il est très probable qu'on la reverra un jour sur la piste.
Vous avez vu la machine entière dans un autre article, alors voici aujourd'hui en gros plan son moteur 500 ACT Compétition de 1928 qui a été reconstruit de A à Z grâce aux plans d'origine. Au cas où vous l'auriez oubliée, la marque - petit quiz - est visible sur le réservoir (Collection Yves Campion).
Célèbre pour ses cadres triangulés, Cotton ne produisait pas ses moteurs. Nombre de ses belles machines furent motorisées par des Villiers deux temps en petites cylindrées. À partir de 250, on faisait appel à des JAP ou des Blackburne (plus chers), mais la plus intéressante de toutes est certainement cette 500 mono avec le 4 soupapes Rudge "Python" de 1932 (Collection Ulm).
La journée touche à sa fin et c'est l'heure des félicitations que Vincent Chamon reçoit au nom de tous ceux qui ont travaillé bénévolement pour que ce Vintage 2015 soit une éclatante réussite... (Photo pixauto.net).
... tandis que pour d'autres, des heures studieuses s'annoncent. Mais il est certain que ces journées de Montlhry ne leur laisseront pas un mauvais souvenir. Tout au plus une petite contrariété !
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À ce jour, la première trace connue de ce qui allait devenir la "Collection Chapleur" date du mois de mai 1965, il y a tout juste un demi-siècle. Dans un article de Moto Revue, sur 4 pages signées "R.C.", étaient décrites une dizaine de machines dont une mystérieuse "De Pontherey" qui, à ce jour et sauf erreur, n’a pas laissé d’autre trace dans l’histoire de la moto (photo ci-dessous et voir la légende). Sur les dix machines présentées presque toutes, sauf une, sont d’avant 1914. Elles témoignaient déjà du goût de Maurice Chapleur pour les premiers âges de la moto, en commençant par la préhistoire puisque le cycle n'était pas oublié dans la chaîne de l'évolution. Pour les photos dans Moto Revue, il avait sorti des motos restaurées, mais dans l'article il était déjà évoqué un hangar-grange débordant de "motocycles" en attente de restauration.
(Pour les agrandir, on clique sur les images qui sont © zhumoristenouveau sauf mention contraire)
Cette De Pontherey a un moteur 4 temps à soupape automatique malgré un cylindre nu qui évoque un deux-temps. Il est fixé au carter par des boulons (4 ?) dont les écrous sont logés entre les ailettes inférieures. Le cylindre est dit "borgne" (sans culasse démontable). La géométrie du cadre est particulière car la formule "à la Werner" n'avait pas encore convaincu tout le monde.
DERNIÈRE HEURE : Selon une information qui vient de tomber sur les téléscripteurs, on a retrouvé trace de la De Pontherey dans la presse de l'époque. Un journal (titre non-cité) écrivait en 1903 ce qui suit : "Journal Cannes 1903 - Vu le grand nombre de demandes dont M. de Pontherey, ingénieur-constructeur, a été l'objet pour sa motocyclette, et après les brillants essais faits par ses machines sur nos routes si accidentées, M. de Pontherey prolongera son séjour parmi nous de 24 heures. Les machines resteront donc exposées jusqu'à jeudi soir 9 courant, 11 rue d'Antibes".
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C'est par la serrurerie que Maurice Chapleur (1912-2005) va entrer dans le monde du travail. Très tôt orphelin de père, il est placé après le "certificat" à la Maison des Apprentis, à Nancy. Au bout de six mois, n'ayant pas montré de passion particulière pour la serrurerie, il se retrouve dans un Atelier de Mécanique Générale. Suite au décès de sa mère, il revient à Lunéville où il a enfin un emploi dans un vrai garage automobile et moto (un peu). La moto, il connaît déjà pour avoir approché de près la Gnome-Rhône du fils du patron lorsqu'il était à la Mécanique Générale. Il n'a pas oublié non plus les bicylindres américaines que les Yankees entretenaient dans un dépôt installé à Lunéville en 1917.
Il devance l'appel et fera son service militaire sur la base aérienne de Nancy. Libéré, il devient chauffeur sur un Renault UDD 6, un 15 tonnes diesel-remorque qui assure la liaison Lunéville-Paris : 14 heures de route à 35 km de moyenne ! Neuf ans plus tard, il passe dans les Chemins de Fer de l'Est. L'occasion se présente de postuler un travail dans les autorails. C'est plus propre que de pelleter le charbon et, surtout, c'est un peu plus "mécanique", cette passion qui le tenaille toujours. Il se présente donc, au culot car il n'a pas vraiment les connaissances requises.
À l'un des ingénieurs-examinateurs qui lui demande ce qu'il connaît du diesel, il lui raconte un dépannage lors d'un de ses voyages lorsqu'une bielle de son camion a commencé à cogner fort : "Avec le copain, je me suis couché sous le 15 tonnes, on a fait tomber le carter et ses 35 litres d'huile. Puis on a enlevé la bielle et son piston, enroulé des chiffons autour du maneton, raccordé les tubulures avec des bouts de tuyau et du fil de fer. On a pu rentrer à Lunéville". Admiratif, l'ingénieur avait hélé son collègue : "Celui-là tu peux l'embaucher, t'en verras pas deux comme ça !".
SI VOUS AVEZ LU JUSQU'ICI, VOUS AVEZ MÉRITÉ UNE PAUSE. VOICI DONC, EN INTERMÈDE ILLUSTRÉ, UN APERÇU DU MUSÉE DANS SA PREMIÈRE VERSION
On voit surtout qu'il n'était pas facile de photographier ces machines tant elles étaient nombreuses et serrées. Néanmoins, on reconnaît (...) de gauche à droite : le siège d'un Vélauto Monet-Goyon, une René Gillet, une Griffon 1905 bicylindre en V, une Buchet mono de la même année, une Alcyon bicylindre (1913/1919 ?).
On avance un peu dans le temps avec les après-14 : une Clément (dont on ne voit que la fourche, puis deux Terrot bicylindres (MAG et peut-être Zedel ?), une ABC avec sa fourche avant à ressort à lames. Les "barrières" étaient faites de chaînes de vélos.
Bloc-moteur, deux cylindre séparés en ligne, démarrage par une "toupie" (manivelle) rendant les pédales superflues, vastes repose-pieds en acier, embrayage au pied, transmission par chaîne, malgré ses 90 kilos, cette machine était plutôt moderne sauf par ses soupapes d'admission automatiques. Elle a été cataloguée de 1906 à 1910 (et peut-être au delà) chez Rochet, Roland, Georges Richard Trèfle à Quatre, soit par trois des marques de la nébuleuse de la Société Industrielle d'Albert (Somme) qui comptait également les marques Regina et Excelsior.
REPOSÉ (E) ? ALORS ON CONTINUE !
Arrive la guerre de 39/40 où le soldat Chapleur est embarqué à Dunkerque puis débarqué à Cherbourg ! Devant l'avance allemande, comme tant de soldats perdus il se retrouve dans les Pyrénées et ne sait plus où joindre son régiment. Il est "récupéré" par des gendarmes... français qui le renvoient en zone occupée. Il se remet donc "au charbon" sur les locos des chemins de fer. Tous les jours, il doit parcourir 20 km pour se rendre au travail, trajet qu'il fait à bicyclette alors qu'il possède déjà trois motos (cachées durant toutes les hostilités). Mais comme il n'y a point d'essence en ces temps de restrictions...
Au lendemain de la Libération il décide de se passer de patron, quel qu'il soit. Fermé durant l'Occupation, un minuscule magasin de cycles, situé face au château de Lunéville est à vendre. Maurice Chapleur se sépare d'une Terrot 350 culbutée et atteint les 35 000 F nécessaires pour réaliser la transaction. Le voici enfin à son compte le 1er juillet 1945 ! Le métier consiste alors essentiellement à réparer des vieux vélos car tout, bicyclettes, pièces de rechange, pneus et chambres à air, etc, tout est contingenté et soumis à l'obtention des "bons matière". Puis, l'horizon s'éclaircissant, les affaires se développent et les Cycles Chapleur passent peu à peu à la moto. Le minuscule magasin de départ s'augmente de la boutique adjacente du coiffeur, puis de celle du marchand de fruits et légumes d'à côté. L'ensemble va finir par devenir une grande concession Motoconfort car à la charnière des années 50/60, la moto et surtout le cyclomoteur sont en pleine ascension. Sur les 910 137 cyclos sortis des usines françaises en 1959, Vélosolex a produit 288 309 machines alors que Motobécane-Motoconfort caracole en tête avec ses 380 848 Mobylette ! En 1964, les Ets Chapleur vendaient 800 Mobylette dans l'année... C'est l'époque où, à juste titre Motobécane pouvait se proclamer "Le plus grand producteur mondial de deux-roues".
On le connaissait par une photo ancienne, ou sur catalogue (daté de 1908), mais voir ce tandem "en vrai" a été une grosse émotion. Pièce unique au monde, on peut le dire (et on l'écrit aussi !) car on n'en connaît aucun autre, ni même des bouts de ce cadre ou de cette fourche si particulière. La transmission par une longue-longue-longue courroie plate, de style machine industrielle, était défendue contre la trapézoïdale par M. René.
Durant toutes ces années Maurice Chapleur a continué d'œuvrer à ce qui lui tenait tellement à cœur : réunir un ensemble de pièces qui retracerait l'histoire de la moto. Il avait si bien conscience de l'importance de ce projet qu’il finira par créer un musée privé dans un endroit historique, au fond d'une grande cour près de son magasin. Fermé à la fin des années 30, ces lieux furent occupés à partir de 1870 par les Verreries d'art Muller, deux frères rivaux du célèbre Gallé, tous deux étant membres de ce qu'on a appelé "L'École de Nancy" (exemples ci-dessous du travail des Muller).
♦
Dix ans après l’article de Moto Revue, en 1976, M. Chapleur m’a fait les honneurs de son musée tout en galeries où se pressaient des dizaines et des dizaines de motos. Tout en me signalant les pièces les plus intéressantes de sa collection (à l’époque, pour moi elles l’étaient toutes !) il a égrené quelques souvenirs.
Il avait commencé à récupérer quelques motos anciennes à la fin des années 30. Mais c'est surtout à partir du moment où il a eu son magasin qu'il s'est lancé dans une recherche plus systématique. Armé d'annuaires et Bottins professionnels du cycle et de la moto, il visitait les marchands de motos, allant jusque dans les Vosges, la Haute-Saône, la Haute-Marne. Il y trouvait des motocistes trop heureux de se débarrasser de ce qui aurait dû partir à la ferraille. Il visitait les vieux ateliers, les caves et greniers susceptibles de recéler des pièces, carburateurs, réservoirs, cadres, moteurs démontés, etc. Comme il le déclara plus tard, vers 1993 : "Ces engins qui sont passés entre mes mains, ce sont comme des enfants qu'on aime d'un égal amour. Du moment qu'il y a deux roues, un cadre, un réservoir et que c'est moi qui les ai refaits, c'est parfait !" (Extrait de "En passant par la Meurthe-et-Moselle", par Gilbert Mercier, Editions de l'Est. La photo ci-dessous est de la même origine).
De haut en bas : Werner à moteur vertical 1901, Alcyon bicylindre de course (au fond, contre le mur, Majestic à côté d'un Ner a Car. À gauche, au premier plan la transmission acatène de la 4 cylindres Motoconfort. Sans parler des vélos anciens, affiches, plaques émaillées, phares, moteurs !
Ses recherches ayant commencé à se savoir dans la région, Maurice Chapleur vit arriver à sa porte toutes sortes d’engins à deux roues, ou plus. Des ferrailleurs venaient le voir avec leur camion, ils abaissaient le hayon arrière et apparaissaient alors des moteurs, de Dion ou autres, des pièces de motos, de tricycles, des cadres, des fourches, de la tôlerie, etc. Au bout d’un certain temps, submergé par les offres, il achetait… au prix de la fonte ! "Je ne refusais rien, m'a t-il dit. Rien, sauf les machines allemandes, ce que j'ai regretté par la suite". C’est son sang lorrain qui lui faisait garder une dent contre l’envahisseur de 1940 !
Je ne sais pas s’il a réalisé son projet au long de sa vie, mais il a constitué le premier vrai musée français. Le plus méconnu et le plus beau par les pièces qu’il présente. C’est aussi le seul à ce jour et qui doit être préservé, quelles que soient les vicissitudes qu’on lui connaît actuellement.
QUAND UNE COMMUNE VEND LES BIJOUX DE FAMILLE
Achetée par la commune d'Amnéville-les-Thermes, la collection de cycles et motocycles qui n’avait pas intéressé Lunéville ("pour des raisons qui ne nous regardent pas...") fut accueillie dans un cadre érigé spécialement pour elle. Alors commença une aventure pleine de rebondissements et pas facile à débroussailler. On peut néanmoins établir une chronologie de ce qui est devenu "l'affaire de la Collection Chapleur" :
3 avril 2015 : Par un article de Lisa Lagrange paru dans le quotidien L'Est Républicain, on apprend qu'Amnéville a décidé de vendre la Collection Chapleur du musée dont l'exploitation est déficitaire, et alors que la commune connaît des difficultés financières. Un repreneur est déjà sur les rangs avec une proposition d'achat à hauteur de 1,5 millions d'euros. Cette offre a été faite le 2 mars 2015 et le Conseil municipal en délibération a approuvé la vente le 2 avril. Aucune autre candidature n'a été recherchée auparavant, ni appel d'offres effectué.
Jean-Baptiste Chapleur, petit-fils de M. Chapleur, avait appris par hasard la décision de vente en s'entretenant avec des membres du personnel au cours d'une visite au musée...
9 avril 2015 : Le maire d'Amnéville, Eric Munier, informe la Direction régionale des affaires culturelles de Lorraine de la décision de la Municipalité de se séparer de la Collection.
Rappelons que l'acquisition de cette collection s'est faite en octobre 2000 avec l'appui financier du Conseil général de la Moselle. Dans le contrat de vente, il est clairement précisé que "les biens vendus sont destinés à être exposés dans un musée consacré aux cycles et motocycles, qui sera construit sur le territoire de la commune d'Amnéville-les-Thermes".
11 mai 2015 : J.-B. Chapleur expose les faits devant des membres du cabinet du président du Conseil Départemental de Meurthe-et-Moselle, lequel est propriétaire du Château de Lunéville. Il est évoqué un transfert de la Collection dans ce même château.
En parallèle, le Service des musées de France souligne que cette collection au "caractère patrimonial majeur" relève du domaine public car acquise avec de l'argent public et destinée à être exposée au public.
21 mai 2015 : J.-B. Chapleur se voit confirmer la fermeture fin juin du Musée qui sera ensuite offert à une location. M. Munier envisage une nouvelle expertise (par qui ?) et une nouvelle procédure de vente. M. Serge Steinbrunn, l'éventuel acheteur est toujours sur les rangs.
Fin mai 2015 : Le Président de la Communauté de communes de Lunéville informe que de grands locaux "divisibles" sont disponibles dans l'immense superficie laissée par la disparition en 2013 de l'entreprise Trailor (Constructeur de remorques de transport).
Les ateliers Trailor occupaient tout le terrain ci-dessus contenu entre les deux rues parallèles et en diagonale (ne manquez pas de cliquer pour agrandir). En vérité il y a place pour plusieurs musées. Reste à financer le projet.
L'affaire suit son cours, à la recherche d'une solution satisfaisante pour tous, mais achoppe sur la question financière. D'une part, Amnéville a besoin d'argent. D'autre part, si Lunéville retrouve "sa" Collection, il faudra là aussi trouver des fonds, que ce soit pour aménager les salles d'une partie du château ou ériger un nouveau musée sur le site "Trailor". Cette dernière solution serait la meilleure pour redonner vigueur à une ville qui n'a pas les attraits d'Amnéville où l'on trouve : une piste de ski indoor unique en France, le 4ème plus beau zoo d'Europe, un aquarium, un pôle thermal, un golf 18 trous et... un casino comme toutes les villes d'eaux (je vous ai recopié la fiche touristique de la ville) ... Des installations exceptionnelles, certes, mais qui expliquent peut-être aussi son actuelle situation financière...
En l'état actuel, il ne serait pas raisonnable de "perfuser" avec la solution Amnéville qui s'apparenterait à de "l'acharnement thérapeutique". Son musée ne va pas cesser soudain d'être déficitaire alors que, par le passé la ville n'a pas fait grand chose pour y attirer le visiteur.
Vous trouverez d'autres informations sur le blog de F.-M. Dumas à l'adresse http://www.moto-collection.org/blog/2015/05/collection-chapleur-a-vendre-a-nouveau/
Il a suivi l'affaire comme moi et avec le même but : que cette collection unique au monde ne soit pas dispersée, qu'elle reste en France et qu'elle devienne le MUSÉE FRANÇAIS DE LA MOTO ET DU CYCLE ouvert au public puisqu'il a payé pour ça !
Une partie de ce souhait parait acquise si l'on en croit la prise de position du Ministère de la culture. Mais la vigilance reste d'actualité.
♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ REMERCIEMENTS ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥
Les premiers vont au Directeur Général de la FFVE Laurent Hériou pour les raisons qu'il connaît. Grâce lui et par son action auprès du Ministère de la Culture les dits et les non-dits de cette histoire plutôt compliquée sont devenus un peu moins obscurs.
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Reconnaissance éternelle à Gilles Destailleur, gourou en retraite des Vieux Clous de Lambersart, qui a bouleversé ses archives pour retrouver des documents d'époque concernant Maurice Chapleur que je cite plus haut (Interview par Gilbert Mercier). Ceci m'a permis de compléter l'embryon de biographie du grand homme dans son activité de collectionneur que j'ai piochée dans "La Gazette des Vieilles Gloires" n° 65 de 2001, une très intéressante publication diffusée alors par le M.C. de Lunéville.
En plus du texte précité, Gilles Destailleur m'a envoyé deux photos rarissimes de Maurice Chapleur "en action".
Elles datent de 1982 lorsque Gilles, ses copains Jean-Pierre Mulliez ("Mumu") et Daniel André décidèrent de rallier Lunéville depuis Lille, leur port d'attache. Le défi était de réaliser ce voyage de 900 km aller-retour avec, par ordre d'entrée en scène : une 350 Peugeot P 117 (1937) ; une autre 350 Peugeot P110 (1930) ; une 500 BSA M20 (1939). Après un arrêt à Saint-Dizier, la P 110 de Mumu refuse de repartir, magnéto hors d'usage. Deux heures de mécanique et ça repart. Arrivée à Lunéville tout juste pour que la boîte de la P 110 rende ses pignons de boîte. Visite du musée Chapleur le lendemain et autopsie de la P 110 qui révèle un carter fendu et une belle salade de pignons. M. Chapleur offre alors un moteur de rechange et on se met à l'œuvre. Mumu a tombé le blouson et s'affaire sur la bête sous l'œil de Maurice Chapleur qui n'a pu s'empêcher à 70 ans d'y mettre la main, tout endimanché qu'il était !
Malheureusement la réparation n'est pas jugée assez fiable et la P110 reviendra à Lille sur la remorque de la voiture d'assistance (prévoyants les gars de ch'nord !). Ensuite, c'est la P117 de Gilles qui fait malaise sur malaise à cause d'une batterie qui charge mal et un allumage à éclipses. Tout ce monde atteindra Lille, sans phare pour Gilles et avec Mumu sur un morceau de mousse posé sur le porte-bagages de la BSA de Daniel. Les copains, on ne les lâche pas comme ça !
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