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Édité par La Cinquième couche, Bruxelles - À retrouver sur : www.5c.be ou en France chez www.bdfugue.com
VU D'UN PEU LOIN, on croirait que c'est l'une de ces parodies de Tintin, bien plus obscènes que drôles, qui encombrent le vouèbe. Vu de près, c'est très précisément ça : "obscène !". C'est à dire que c'est un ouvrage mêlant dessins, courtes histoires, affiches "qui blesse ouvertement, qui heurte la décence, la pudeur ou le bon goût" (Définition des dictionnaires), mais pas dans le sens couramment admis des mots "décence, pudeur, bon goût" (*). L'auteur, Anton Kannemeyer, est un Afrikaner d'origine néerlandaise qui a pris Tintin comme prétexte pour régler des comptes avec ses concitoyens d'Afrique du Sud. Ce qui n'arrange pas son cas auprès de certains de ses détracteurs, c'est qu'il cible autant les blancs que les noirs de ce pays et de l'Afrique en général. Du coup, il est alternativement le "raciste" des uns ou des autres suivant la couleur de celui qui s'exprime. Et il présente des situations imaginaires avec une férocité égale à celle qui règne lors des affrontements qui ravagent les deux communautés. On aura compris que ce n'est pas un album de BD comme les autres. C'est féroce et acide dans l'ironie et dans l'humour noir. À prendre au second, voire au troisième degré, plutôt Charlie Hebdo que Canard Enchaîné.
À l'occasion, Anton ne se prive pas de se payer la fiole de tous ceux qui vivent sur le juteux héritage de l'auteur des Tintin. Et aussi de leurs avocats en embuscade du côté de Moulinsart. Interrogé à ce sujet par Xavier Guilbert (www.du9.org), Anton répondait : "Pour revenir à Moulinsart, je n'ai pas eu de réponse. L'éditeur avec qui je travaille a contacté Casterman, et Casterman avait exprimé de l'intérêt pour publier le livre, mais ils ont ensuite envoyé deux avocats qui ont tout de suite dit : "Oh mon dieu, non...". C'est qu'en toile de fond de tous ses dessins, peintures, et bandes dessinées Anton glisse souvent des allusions au très controversé Tintin au Congo.
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Ici, on a bien plus qu'une allusion avec cette reprise d'un gag original bien connu mais dépassé en horreur. De plus, Anton appuie là où ça fait mal puisqu'il évoque l'une des plus épouvantables exactions de l'époque du Congo belge, alors propriété personnelle du roi Léopold II
Attends, Germaine, j'esseplique : les colons y exploitaient le caoutchouc. Ils faisaient récolter le latex de l'arbre à caoutchouc par les Africains souvent réquisitionnés par villages entiers. Et lorsque la quantité rapportée n'était pas suffisante, on coupait une main du fautif ! (Voir les photos sur le vouèbe). Si ça ne suffisait pas, c'est tout un village qui était rasé et incendié...
Cependant, on note que si le Tintin in Afrika est facilement (!) reconnaissable, l'artiste a eu soin de lui coller une tête bien différente tandis que Milou est passé au noir. En fait, cette tête est celle de l'auteur, à peine caricaturée avec ses longues pattes le long des joues.
Dans un chapitre baptisé "C comme Cauchemar", le blanc est à son tour obligé de porter le "tipoye", moyen de transport traditionnel mais surtout utilisé par les blancs dans les pays colonisés
... et Tintin (le vrai, celui d'Hergé) ne pouvait pas y échapper !
On cherche en vain la moto dans "Pappa in Afrika", mais il y en a peut-être ailleurs dans la quantité de dessins, peintures, etc, que Anton Kannemeyer a publiée chez de multiples supports imprimés. La plus insolite de ces publications est sans doute Le Monde Diplomatique qui a édité en 2010 un recueil rassemblant tous les dessins de ses collaborateurs sous cette couverture d'Anton qui s'est lui-même mis en scène. Ouf ! Il y aura tout de même une moto dans cet article !
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(*) La véritable obscénité, ce ne serait pas plutôt ÇÀ ?
(*) La véritable obscénité, ce ne serait pas plutôt ÇÀ ?
... ou encore ÇÀ ?
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Quelques belles photos pour ceux qui aiment la neige mais pas les skis et les stations qui vont avec !
TOUT EN GLISSE ! Vu la grosse plaque avant sur la Béhême (arrière rigide), et la caisse caractéristique du sidecar Felber, on doit être en Autriche.
La décoration des Felber semble avoir toujours été la même, avec seulement des différences dans les couleurs de peintures (ici attelé à une 250 PUCH TF)
La neige a bien l'air authentique (ou carbonique ?), de même que la René Gillet, mais les deux demoiselles sont un peu trop parfaites pour être vraies. S'agirait-il d'une séquence de cinéma ?
Détail grossi de la couverture de la revue hebdomadaire allemande Motor und Sport du 25 décembre 1938.
En se tordant un peu le cerveau, on peut voir que les machines de ces "z'amours" sont des Opel, remarquables (entre autres) par leur fourche pendulaire en acier matricé (Document Moto-Collection.org)
Qui dit neige dit froid, donc glace et glisse. Karl Schönborn avait une lame de scie circulaire sous la main ainsi qu'un petit moteur et quelques bouts de tubes. De quoi construire un "skidoo" à glace qui a bien dû étonner sa copine qui reste néanmoins digne sous son volumineux couvre-chef.
Encore un adepte du "do it yourself" mais qui a trouvé plus raisonnable de faire confiance en 1915 à une motorisation à la valeur éprouvée...
... présentée par la roue motrice Smith, l'une des nombreuses réalisations américaines du genre qui affronta la concurrence des Briggs & Stratton et autres Merkel. Il y eu aussi l'anglaise Wall Auto Wheel que l'on pouvait trouver en France chez Monet-Goyon (Document Yesterdays.nl)
On peut aussi préférer le plaisir solitaire du sidecar sans caisse donc sans avoir de passager (ère) à convaincre. La machine est une AJS.
Il y a bien des manières de remiser sa moto pour l'hiver, mais la congélation est peut-être excessive et surtout ne fonctionne que pour un seul hiver. En effet, tous les nutritionnistes vous le diront : 'Il est déconseillé, voire dangereux, de recongeler une denrée qui a été décongelée".
Johnson Motors était l'importateur Triumph pour la côte ouest des États-Unis, mais sans exclusive concernant son Cycle Sno-Go qui pouvait s'adapter aussi bien à une Honda qu'à une Yamaha ou Suzuki. On pouvait également l'utiliser dans les déserts de sable, ce qui aurait dû intéresser les concurrents du Paris-Dakar, mais celui-ci n'existera que 10 ans plus tard...
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UNE BATAILLE GAGNÉE... Bientôt la guerre ? C'est ce que peut se dire Monsieur Mark Zuckerberg en voyant comment les "rebelles" se plient facilement aux règles - non écrites, pas folle la guêpe ! - qui censurent tout ce qui est publié ("posté", ils disent) sur son Fa&@#! book. Dernier exemple : la fresque du graffiteur pboy inspirée de "La Liberté guidant le peuple", célèbre tableau de Delacroix tel qu'exposé au Louvre (ci-dessous)...
... dont pboy a donné sa version sur un mur de Paris, rue d'Aubervilliers dans le 19ème arrondissement et qui se veut un hommage aux gilets jaunes (ci-dessous). Sauf que si les personnages principaux sont, à peu près semblables à ceux de l'original, on note une grosse différence concernant cette "Liberté" elle-même dont la poitrine est cachée par un soutif blanc.
L'explication vient de Stephanie Lemoine, journaliste et spécialiste de l'art urbain mural. Selon elle (in Le Monde du 19 janvier), l'artiste compte sur les réseaux sociaux pour répandre ses idées et son "message". Donc il lui faut éviter d'être boycotté par, entre autres, fuquebook, l'un des plus puissants par son nombre de visiteurs, d'où "cachez ce sein que je ne saurais voir". Bien joué, Marko, maintenant le "posteur" se censure lui-même !
Note à benêt : des Libertés au sein nu, il y en a en pagaille sur le vouèbe et pas censurées, heureusement, tout comme notre Marianne nationale autant que républicaine. Le groupe, signé Daumier, représente la République nourrissant ses enfants, autrement dit le peuple français.
Le zhumoriste, vous offre ici les images que facebook vous interdit de voir !
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Pas très fringant, mais encore capable de tenir le guidon d'une motocyclette, le livreur millésimé 2018 nous apporte un bébé 2019 à qui nous confions tous nos espoirs avec nos vœux, comme l'exige la tradition.
BREXIT OU PAS BREXIT, quel que soit le résultat on peut espérer qu'il ne nous privera pas d'artistes comme Grayson Perry dont les œuvres sont actuellement visibles à la Monnaie de Paris (11, quai de Conti dans le 6e, jusqu'au 3 février). Cette exposition fait suite à plusieurs autres à travers le monde après, noblesse oblige, celles plus anciennes du British Museum et de la Royal Academy of Arts où on le voit arriver ci-dessus. Élevé au rang de CBE (Commander of the order of British Empire), Grayson Perry n'est donc pas tout à fait le rigolo une peu frappé qu'on pourrait croire, surtout les Continentaux si raisonnables que nous sommes.
Rameutant la presse et la télévision, les préparations de l'installation au British Museum des œuvres de Grayson Perry (en robe rose, à droite sur le péristyle) ne sont pas passées inaperçues.
L'artiste (à droite qui se présente sous le pseudonyme de Claire !) en compagnie de sa fille (à gauche) et de Philippa sa femme. Cette dernière ne laisse pas sa part en matière de tenues colorées lors du vernissage d'une exposition...
Grayson Perry et Philippa, un mariage très classique en 1973
Dans une interview, on a demandé à Philippa quel était son souvenir le plus romantique de celui qui allait devenir son mari, elle a répondu : "La première fois qu'il m'a emmenée sur sa moto". La suite, c'est Perry qui la raconte : "Je pense que je voulais frimer après une soirée tardive et nous sommes donc partis plein pot sur la M11 (l'autoroute Londres-Cambridge) en pleine nuit. Au bout d'un moment, une soupape a lâché ! On a poussé la machine pendant deux heures sous la pluie. La soupape cassée est toujours sur mon bureau en souvenir de ce moment !".
La Harley est la pièce la plus spectaculaire du travail de Grayson, mais l'homme est un touche-à-tout doué. Il domine autant la peinture que le dessin, la poterie, la sculpture, la tapisserie, la céramique, l'écriture et aussi la conduite de ses motos puisqu'il ne possède pas de voiture. "J'ai une Harley pour l'été, dit-il, pour rouler lentement en profitant du paysage et une KTM pour aller vite de A à B en hiver". Elle figure d'ailleurs en arrière-plan sur l'immense autoportrait en noir-et-blanc ci-dessous.
Outre la KTM, Grayson truffe sa toile de détails mécaniques, bombe de graissage WD40, pince multiprises, combinaison de cuir Dainese accrochée dans le placard à gauche, sans oublier le teapot traditionnel.
Dans ses toiles ou ses tapisseries et aussi dans la vie lors de ses apparitions en public, Grayson aime mélanger les genres, d'où ses tenues féminines qui font partie désormais de son personnage, de son art. Son intention est d'obliger le public à se poser des questions sur le(s) sexe(s), la politique, la religion, le travail, les codes de la société anglaise, l'évasion fiscale, le racisme et tutti. On retrouve chez lui l'esprit ravageur des Monty Pythons (dans le film "Le sens de la vie"), esprit matérialisé ici par ses peintures ou sculptures.
À gauche, Donald Trump plie le genoux devant Alan Measles, le nounours de son enfance qui est un autre alter-ego de Grayson (seulement en peinture, alors que Claire tient ce rôle dans la "vraie vie"). La moto est omniprésente comme dans cette autre céramique, à droite, où l'on reconnaît sans mal le réservoir argent/noir d'une Norton ACT .
Peut-être inspirées par la célèbre "Tapisserie de Bayeux", qui est aujourd'hui considérée comme un trésor sur la vie au Moyen-Age, les œuvres de notre artiste seront une source de renseignements pour les historiens du futur. D'un coup d'œil ils pourront savoir ce que signifiaient Smirnof, Visa, Microsoft, Rolex, Volvo, Easyjet et autres KFC qui parsèment les tapisseries de Grayson. Sans atteindre les 68 mètres de long du modèle, elles sont dès aujourd'hui un véritable rébus pour le visiteur.
"La conquête du trône d'Angleterre par Guillaume de Normandie" 1064-1066
Poussée par la roue arrière de la Démocratie, la Tolérance, l'Égalité et la Justice Sociale, la moto vengeresse de Grayson écrase l'Évasion fiscale, le Racisme, le Sexisme, la Pauvreté... vaste programme menacé par le réchauffement climatique !
Plutôt colorées et jubilatoires, les œuvres sur toiles, céramiques et tapisseries de l'expo prennent une tonalité plus sombre dans certaines sculptures. Cette femme, La Mère, ployant sous le poids de ses misérables possessions avec son bébé dans les bras symbolise tout le malheur du continent africain...
... mais, comme un clin d'œil incongru, une petite moto (de speedway) s'est dissimulée dans la sculpture surmontée d'une couronne qui fut peut-être royale dans une autre vie.
Le monde du travail est présent dans cette allégorie où l'on re trouve le souvenir des terribles grèves des mineurs de 1984 à 1985 (2 morts, 20 000 blessés), sous le règne du gouvernement dirigé par Margaret Thatcher.
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