-
UNE BOUTIQUE OÙ L'ON VENDRAIT quelques canettes, des revues, des livres, des CD, des bandes dessinées, des DVD et tutti ce qui tourne autour de la motocyclette, on en a connu quelques unes dans Paris. Quelques uns s'y sont cassé les dents et le compte en banque (pas tous, il y encore de vieilles ardoises qui traînent). C'est du domaine du rêve mais qui s'est réalisé au Japon à l'enseigne de Bookcafe Bold'or avec la Honda du même nom devant la porte (*). Une façade plutôt modeste, dans la ville de Niigata, à 300 km au nord de Tokyo. Plus de 800 000 habitants et donc un pourcentage de motards important. À en juger par son blog et son fuck§?81!!!book, ce Café Bol d'or est un lieu de passage obligé. Ce qui a permis au patron de l'établissement de se constituer une belle collection en photographiant tout ce qui passe sur deux-roues à portée de son Canon. Voici quelques échantillons qui font voir sur quoi roule le motocycliste nippon.
(*) Avec une bonne loupe, on lit 'CB750 F' sur le cache latéral alors que le modèle vendu sous le nom "Bol d'Or" était bien une 900 du moins en France. Où est l'embrouille ?
ET, SURPRISE ! SURPRISE ! on commence par une chose française. Enfin, française par sa naissance, mais élevée en grand au Japon. Vous aurez reconnu le scooter pliable Valmobile que Victor Bouffort inventa au début des années 50. Comme d'habitude, il ne récolta qu'un succès de curiosité auprès des Français plus accessibles à la Mobylette qu'à ce qu'il virent comme un gadget. Peu importait sans doute à son créateur qui passera vite à d'autres véhicules aussi brillants, à 3 et 4 roues, voire à chenilles !
Par miracle, cette machine intéressa les Japonais de Hirano qui en prirent la licence et se lancèrent dans sa fabrication en 1960. Quelques modifications sont visibles concernant la construction du "triangle avant" supportant la colonne de direction, mais le schéma défini par M. Bouffort est bien le même.
On parle d'une commercialisation de quelques milliers d'exemplaires pour le Japon, certains ayant été exportés vers les États-Unis. Mais comme la firme Hirano disparaît en 1961, cela laisse assez peu de temps pour une construction en grande série.
Voici ce que l'on trouve en soulevant le panneau supérieur qui reçoit le coussin-siège. En France, le moteur était un deux-temps VLT à deux vitesses par câbles à la poignée gauche. Sur le modèle Hirano (ci-dessus) on voit ce qui pourrait être un embrayage centrifuge avec poulie extensible, ainsi qu'une suspension arrière de tout l'ensemble sur des anneaux caoutchouc (Note à benêt : merci de ne pas s'enflammer en parlant d'un engin étudié "pour les troupes parachutistes". M. Bouffort s'adressait aux automobilistes, navigateurs ou aviateurs de plaisance. Cela dit, l'armée en a "évalué" de bien pires !
Pour parfaire vos connaissances en japonais et briller en société, voici la publicité pour le scooter que les Ets Hirano produisirent au milieu des années 50. Il se signalait par des roues plus grandes, mais son deux-temps de 60 cm3 le classait dans les utilitaires urbains à n'utiliser qu'en solo.
Encore un produit français puisque, comme pour le Roquefort, c'est "écrit dessus" : PEUGEOT ! On s'interrogera longtemps sur les raisons font que ce Speedfight2 a pu intéresser quelqu'un dans un pays qui produit une telle quantité de scooters (du moins avant que la Chine...). Il faut sans doute chercher du côté du snobisme ou du goût pour l'exotisme, banal chez nous, il épaterait le Nippon ? On peut aussi invoquer un cas de "collectionnite". En effet, ce 50 (ou 100 cm3) a disparu en 2009, donc déjà collector's.
Avant d'attaquer "le tout venant", continuons "dans le bizarre" (avec le Tonton Flingueur/Francis Blanche). Donc avec un Honda, mais oui, mais oui, jamais vu par chez nous. Baptisé MotoCompo, c'est l'équivalent du Valmobile des années 50. D'ailleurs, si vous en doutiez, la publicité qui le présentait...
... ne laisse aucun doute quant à l'usage auquel il est destiné... et ce n'est pas non plus un engin parachutable qu'on se le dise !
Du plus petit au plus gros avec une V Max victime d'un "stretching" dont on a vu les plus beaux specimens à la Black Bike Week de Caroline du Sud récemment chroniquée ici-même (Voir à l'article Myrtle Beach en cherchant à l'aide de la case quelque part ci-contre).
Au Bold'or Cafe, la carte des "vins" est limitée, mais la présentation est bien ciblée sur la clientèles. Si le single (solo) est compréhensible, de même que les Vtwin, Ftwin , VerticalT ou même Ltwin (Ducati), le Special reste un mystère à 550 (yens ?).
Z'avez dit Ducati ? Tiens, n'en v'là une belle !
... et pi une autre, pas vilaine non plus... et bien freinée.
Encore du jaune mais pas du tout dans le même style ! Autant l'italienne est faite pour tailler la route, autant la japonaise... est taillée pour les grands espaces avec un large guidon qui vous permet de respirer la nature à pleins poumons. Bel état d'origine avec ses clignotants, compteur et compte-tours.
Le propriétaire de cette Triumph est sans doute un client de Bol d'or Cafe, mais il est probable qu'il ne s'y rend pas avec sa machine. Chez nous, mettre sa moto dans son appartement est une preuve d'originalité un peu branque. Au Japon, c'est souvent une nécessité vu les tarifs de l'immobilier urbain. À plus forte raison lorsqu'il s'agit d'une Trident.
Une spécialité nippone des années 60, la flèche de direction que l'on a connue en Europe sur les automobiles, mais jamais sur les motos (sauf du fait d'un petit inventeur, ou bricoleur, bien intentionnés).
Le premier hipster français qui lance çà chez nous est sûr de faire un malheur, avec un succès qui détrônera le clignotant en bouts de guidon.
Le pétrole est devenu tellement cher que lorsqu'on l'achète directement au producteur, on rentabilise un maximum en utilisant l'emballage. Avec un baril entier et la moitié d'un autre, on obtient une construction qui n'aurait pas déparé dans les "Fiches pratiques du défunt Professeur Choron" (Hara-Kiri Mensuel, lui aussi défuncté).
Le bricolage est un art véritable pour lequel tout le monde n'est pas doué. Ce protège-carter fait main en est une preuve regrettable...
Cette jolie étoile a traversé notre ciel de façon très brève - je parle ici de la moto - sans doute trop différente de l'image des Kawasaki, machines "violentes" par excellence. Le 250 simple ACT de cette Estrella à deux soupapes "seulement" est venu trop tôt. Sa place est aujourd'hui occupée par d'autres asiatiques bien moins chères.
1 commentaire -
ALORS COMME ÇA, QUAND ON VOUS EN TOUCHE UNE, ça fait bouger les autres ? (comme disait l'un de nos derniers présidents)... Bien sûr, je veux parler de vos neurones qui ont immédiatement frétillé en voyant le nom de NORTON puis "rotatif" apparaître sur votre écran. Premier arrivé, un lecteur d'Outre-Rhin donc bien placé pour évoquer Richard Küchen. Cet ingénieur allemand touche-à-tout (boîte à chaînes Zündapp, Victoria Bergmeister, twin F.N., etc) a donné lui aussi dans le rotatif avec un mono qui, comme beaucoup de ses projets n'a pas donné de suite commerciale. Néanmoins est parvenu jusqu'à nous le moteur que voici.
Bien complet de son "chapeau-culasse", on dirait presque un classique arbre à cames en tête qui serait commandé par un arbre vertical...
... le voici maintenant sans son "chapeau" qui dévoile un distributeur cônique avec son entraînement et une bougie en position inhabituelle.
Et l'histoire s'arrête là, du moins pour le moment. Malgré quelques 12 à 15 heures passées sur le vouèbe, aucune mention de ce moteur n'est faite dans les pourtant nombreux articles consacrés au bonhomme et à ses œuvres. Gardons espoir, mes frères, peut-être qu'un jour quelqu'un reprendra l'affaire qui reste classée dans les "cold cases", comme à la télé.
On ne va pas refaire l'historique des rotatifs Wankel de la moto qui s'est conclu par une catastrophe chez DKW-Hercules ou un bide chez Suzuki et autres Norton. Vous trouverez tout à ce sujet sur le site de F.-M. Dumas (moto-collection.org) qui a ratissé jusque dans les "coinstots bizarres" chers à Boris Vian (in Je voudrais pas crever). Fin de la minute pouhiétique.
Il a existé plusieurs motos anglaises à distribution rotative, mais il s'agissait surtout de réalisations personnelles. Seul le moteur Cross, au milieu des années 30, a suscité un semblant d'intérêt chez des constructeurs patentés. Il s'agissait de Vincent puis Rudge ou encore Velocette.
Roland (Rodney) Cross himself avec la Vincent 500 équipée de l'un de ses moteurs à distributeur rotatif en vue d'une participation au Tourist Trophy 1934. Le pilote est Frank Milsom, chef des essais de la Société Cross. La machine figure aujourd'hui dans le musée de la société qui existe toujours à Bath, elle sort parfois dans des réunions d'anciennes (ci-dessous).
Le même type de moteur sera utilisé sur une 250 Rudge au T.T. 1935 mais son pilote chuta aux essais et blessé au genou fut contraint à l'abandon. Préparée trop à la hâte, une autre 500, toujours à moteur Cross, ne put prendre le départ du T.T. Senior.
Le premier Cross date de 1922. Celui de l'extrême-droite aurait été monté sur une Velocette en 1928 dont on ne sait rien de plus. On le retrouve en dessin ci-dessous.
Je laisse à quelqu'un de qualifié le soin d'expliquer la présence de deux chaînes de commande de la valve rotative engrénant sur des pignons de tailles différentes.
Les années passent mais Rodney Cross s'obstine et poursuit ses recherches. En 1937, trois de ses moteurs en 250, 350 et un 500 (les deux photos ci-dessus) sont montés sur des bas-moteurs de Rudge. Ils seront confiées à un essayeur de Moto Cycling qui n'en dira que du bien...
... excepté sur un détail concernant le 250 (ci-dessus à gauche) dont le cornet du carburateur à tendance à aspirer... le pan du manteau du pilote ! À part ce minime inconvénient, vite supprimé par la pose du carburateur à l'extrémité d'une pipe à angle droit (photo précédente du 500), ces machines sont d'un rendement satisfaisant (selon Motor Cycling). Celui de la 250 est comparable à celui d'une 500 à soupapes latérales, et les montées en régime - on parle de 7 500 tours/minute - sont impressionnantes. Avalanche de louanges, donc...
Comme tous les rotatifs, le problème vient de l'étanchéité de la chambre dans laquelle évolue la valve. Il faut qu'elle soit abondamment lubrifiée sans que ce lubrifiant pénètre dans le cylindre. R. Cross va s'appliquer à résoudre cette difficulté par des segments spéciaux qui deviendront une spécialité de la Cross Manufacturing Company Ltd. Jusqu'en Chine, il s'en vend aujourd'hui des millions dans le monde et de tous diamètres pour les moteurs d'avions, les turbines (record avec 1,80 m. de diamètre !), en bref tout ce qui coulisse, tourne et frotte dans un cylindre, comme par exemple... dans nos motos.
Une coupe du haut-moteur qui permet peut-être de mieux comprendre le fonctionnement de la valve Cross, ici sur un 250. La pipe d'admission n'est pas dans l'axe de la valve mais à 90% derrière inlet, à droite pour ceux qui ont de bons yeux sur ce dessin impossible à agrandir.
Arrive 1939 et un nouveau rototo du nom de Aspin se met sur le marché. Il est d'allure plus classique, proche d'un moteur "normal" à soupapes, quoique pas vraiment mis en valeur sur cette photo. C'est une partie-cycle BSA qui accueille ici un moteur de Velocette bien transformé. L'état de cette machine ainsi que le porte-sacoches typique des machines militaires laisse à penser que l'armée se serait intéressée à ce type de moteur. Plutôt silencieux, simple avec un nombre réduit de pièces en mouvement, il avait tout pour être confié à des mains supposées a priori peu expertes.
Comme il se doit pour un nouveau projet, rien n'est jamais définitif dans la construction finale et les protos sont nombreux, même si l'on tourne autour d'un même schéma de base qui consiste en..
... une valve cônique en alliage léger est savamment découpée afin, en tournant sur son axe, de distribuer les gaz côté admission puis côté échappement. Comme sur le Küchen, la commande se fait par un arbre vertical et un jeu de pignons (Dessin de La Nature n°3025 du 15 mai 1938 et repris sur sciences.gloubik.info).
Une guerre a passé, mais le "rotatif" démange toujours les esprits chercheurs. En 1947, deux ingénieurs anglais, J. et E. Brown s'offrent à transformer des Norton (ci-dessus) à l'aide de la valve rotative Johnson.
La commande de la valve s'effectue ici par un arbre vertical et des pignons d'angle. Sauf par l'admission située perpendiculairement, on est alors assez proche de la future solution du Norton de 1952 (voir article précédent). Montée sur une Norton 500 Inter, la transformation Johnson s'avéra assez puissante pour l'emmener à près de 145 km/h. Comme d'habitude, la revue Motor Cycle qui effectua l'essai de l'Inter n'eut qu'à se louer de ses performances, de son silence de fonctionnement, de sa souplesse, etc. Mais, là encore, l'intendance refusa de suivre...
Un dernier pour la route (Rudge), pas de date, pas de réalisateur, origine perdue, sans doute l'un des premiers Cross.
2 commentaires
Suivre le flux RSS des articles
Suivre le flux RSS des commentaires