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ALCYON : un catalogue, une moto
CE N'EST PAS VRAIMENT UN CATALOGUE, mais seulement des extraits de la présentation d'une 500 assez extraordinaire pour retenir l'attention de la presse britannique. Les images de cette Alcyon proviennent du Monde Motocycliste, une revue des années 30. De très bonne qualité, surtout par rapport à Moto Revue, l'autre référence de l'époque, elle n'a duré qu'une petite centaine de numéros, agonisant en grand format après être devenue "touristique et automobile" plus que "motocycliste".
À la fin des années 30, une forêt d'arbres apparaît dans la construction de la transmission chez les constructeurs français de motos. D'Alcyon à Utilia, en passant par Dé-Dé, Dollar, Dresch, Helyett, Magda, Ultima et quelques autres, tous ont à leur programme une ou plusieurs machines dont la chaîne de transmission finale est remplacée par un arbre. Les cadres étant alors rigides, il n'est pas question de faire appel à un cardan ni, par économie, à un "pont" à la B.M.W. On trouve donc une vis sans fin, même si les publicités de l'époque mentionnent pour la plupart une "transmission par engrenages".
Bien plus que la transmission par arbre, c'est la construction en bloc-moteur qui a intéressé Motor Cycling. C'est une une technique qu'ils vont appliquer à leur tour au terme de nombreuses décennies de réflexion...
Belle mécanique dont malheureusement, on ne saura jamais si le ramage était au niveau du plumage car la crise mondiale de 29 qui va bientôt atteindre la France élaguera tout net cette floraison... d'arbres.
Le bloc-moteur et la transmission par arbre ont un prix... coquet : 8 575 F ! Hors machines de course (Terrot, Clément Berceuse), cette Alcyon est la plus chère de toutes les 500 françaises à culbuteurs. Elle est talonnée, de très loin, par la Koehler-Escoffier mono arbre à cames en tête (7 900 F), précédant la Terrot NSS (7 700 F). Viennent ensuite les Monet-Goyon, Motobécane, etc, la dernière étant la Dollar Chaise ACT à 6950 F. Il aurait été intéressant d'établir la comparaison avec les machines étrangères mais les importateurs ne donnent aucun prix, barricadés derrière la formule "Au cours du jour de la livre, du dollar, du mark..."
C'est le spécialiste Bridier-Charron qui fournissait les boîtes à vitesses, mais chaque constructeur devait construire son propre bas-moteur pour l'adapter. J'ai vu aussi une publicité Moussard proposant une boîte avec transmission par arbre sans trouver une marque qui l'aurait montée.
(La recherche à travers les articles de Moto Revue est extrêmement pénible dans cette fin des années 20 car tributaire d'une table des matières totalement imbécile. Exemples : Le compteur de B.M.W. est classé à la lettre "L", un nouveau châssis de sidecar se trouve à la lette "U", et ainsi de suite !)
Comme sur les B.M.W. le freinage de l'arrière se fait par serrage sur un tambour fixé en sortie de boîte. Une technique rudimentaire, surtout avec une si courte commande, de surcroît actionnée au talon.
Afin de convaincre le motocycliste de la supériorité de l'arbre sur la chaîne, le journaliste du Monde Motocycliste utilise un exemple qui laisse rêveur, car selon lui, l'arbre procure "une impression de sécurité telle qu'on ne pense jamais à la possibilité d'une panne, alors qu'avec une chaîne un peu bruyante on se demande souvent si l'on ne sera pas lâché par la transmission au beau milieu du parcours".
Le frein avant est un Perrot-Piganeau, fonctionnant selon système breveté à effet auto-freinant. Selon le Monde Motocycliste, l'action simultanée sur les deux commandes des freins permet "un arrêt instantané sans blocage redoutable pour les pneus".
Tags : Alcyon, Motor Cycling, Le Monde Motocycliste, Bridier-Charron, Moussard, B.M.W., Dé-Dé, Dollar, Dresch, Helyett, Ultima
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Commentaires
2thefrenchowlLundi 20 Janvier 2020 à 00:33Un pont, ca marche dans les deux sens sans usure speciale et avec de faibles pertes en friction...
Une vis sans fin ne marche bien que dans un sens a moins d'avoir une demultiplication genre 1/2 au max, plus un rendement atroce... Attention a l'usure et parfois, si mal etudie, blocage quand on coupe les gas...
Pont ou vis sans fin coutent autant l'un que l'autre, alors, on peut se demander pourquoi la vis?????????
Une de mes Jonghi a un Perrot Piganneau a chaque extremite, c'est assez bizzare mais bien pense… Mais comme la vis sans fin, ca ne marche que dans un sens, celui de la marche!!!!!!!!!!!!! Attention les demarrages en cotes...
Patrick
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Lundi 20 Janvier 2020 à 12:17
Ne pas oublier que la mode (de l'arbre) y était pour quelque chose, de même que l'échappement double tubes. Marc Defour a écrit quelque chose là-dessus dans le Motocyclettiste... Aujourd'hui c'est l'échappement relevé au ras des fesses qui a la cote... en attendant autre chose.
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3UltimanLundi 20 Janvier 2020 à 07:54Magnifique salon 1928 avec cette floraison de belles motos à transmission par arbre. Malheureusement, c'était 1928!
Le bloc à transmission par arbre Moussard était celui monté par au moins Helyett et Dédé ( et Juery pour des triporteurs) avec des moteurs Moussard 2 temps en 250 et 350 et Sturmey en 500 4 temps à soupapes latérales. Ultima a également utilisé un frein sur l'arbre (le dispositif était enfermé dans un carter) sur ses blocs à transmission par arbre (série D) puis un frein arrière plus classique à tambour. Un relai pouvait alors donner 2 gammes de 3 vitesses à la machine ("spéciale side car") en lieu et place de ce frein en sortie d'arbre de transmission.
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Lundi 20 Janvier 2020 à 12:19
Merci de ces précisions très... précises !
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4François ArsèneLundi 20 Janvier 2020 à 12:30Je me souviens de la Majestic d'un défunt ami, le modèle à châssis, qui était dotée d'un 500 Chaise à transmission par arbre Bridier-Charron.
Le pont à vis est effectivement une solution technique imparfaite, même dans sa version la plus élaborée à roue creuse et vis globique : mauvais rendement, friction, usure et utilisation d'huile de ricin impérative. Pont à vis utilisé par les motoculteurs Staub. Et aussi par Peugeot qui s'est accroché à cette configuration jusqu'à la 404 !
5jackymotoLundi 20 Janvier 2020 à 17:15Ben oui, avec les ponts à vis, tu doubles le frein moteur. Le réducteur de ma 300 Cleveland était comme ça, le système était même dessiné sur le transfert de tête de cadre. Peugeot maîtrisait très bien son sujet. Idem Ford dont les versions utilitaires des T étaient équipées d'un pont à vis beaucoup plus solide que la version normale...au prix d'un poids phénoménal. A la décharge des constructeurs de ponts à vis, les machines à tailler Gleason pour les ponts "normaux" étaient fort justement qualifiées de "démoniaques" par Gabriel Voisin dont les autos dépassant 100 bourrins avaient justement tendance à "descendre" les couples conique...J'ai vu fonctionner deux machines à tailler Gleason dans ma vie: à la Saviem à Limoges et dans la rue, sous une bâche à Delhi, il y a de quoi avoir peur avec les mouvements dans tous les sens. Impossible de faire des outils pour des petites séries, ce qui avait justifié les ponts à vis pouvant s'usiner avec des machines ordinaires.Pour la petite histoire, les inusables couples coniques des Ratier étaient usinés (dans de l'acier!) par la machine récupérée dans l' usine d'Henri Dresh.
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Lundi 20 Janvier 2020 à 18:49
Ben dites-donc, les gars ! On en apprend des choses avec vous ! Continuez !
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6ZertonLundi 20 Janvier 2020 à 18:587François ArsèneMercredi 22 Janvier 2020 à 17:18Chez Peugeot, la réduction par vis sans fin semble avoir été la culture du bureau d'études, témoin la BMA Cyclo-moto CM1 des années 20. Son petit moteur d'à peine plus de 100 cm3 à bielle en porte-à-faux avait son vilebrequin disposé en long. La soie dudit vilebrequin usinée en vis sans fin attaquait une couronne en bronze entraînant la poulie de courroie trapézoïdale de transmission. Le petit moteur se serait volontiers dispensé qu'on lui ajoute ces pertes par friction ! Et le couple réducteur couronne en bronze-vis sans fin ne brillait pas, semble-t-il, par une robustesse à toute épreuve. Un moteur disposé classiquement avec un réducteur par engrenages ça aurait été trop simple, trop commun ?
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Mercredi 22 Janvier 2020 à 18:10
À l'époque où je me croyais capable d'une restauration, je me suis trouvé à la tête de deux Tobec 350, la seule nouveauté "moderne" de la production française d'après-guerre. Démontée toutes deux pour passer dans mon sous-sol, j'ai découvert un peu de limaille d'un jaune brillant dans le carter où se trouvait la pompe à huile. Celle-ci est entrainée par une vis sans fin en bronze (?), d'où limaille. J'ai refermé le tout et les deux bécanes sont restées une trentaine d'années au repos. J'ai fini par les revendre pour le prix d'achat : 250 F X deux = 500 F...
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8jackymotoMercredi 22 Janvier 2020 à 21:02Effectivement, quand je vidange les ponts à vis, il y a souvent de la poudre de bronze au fond. Le problème arrive quand on vidange de la limaille d'acier provenant des roulements butées de la vis sans fin. C'est en général ce qui casse en premier, les vis-pignons tiennent bien le coup, même sur les motoculteurs de bas de gamme.
9gillesVendredi 24 Janvier 2020 à 13:37Quelques chiffres de comparaison tirés du catalogue français Velocette de fin 1930 pour l'année 1931:
KTP 8600 Frs, KTT 11500 Frs, GTP 5800 Frs et KSS 9100 Frs, sans compteur ni porte bagage respectivement facturés 325 et 90 Frs par Henri BOUDENE, l'importateur.
Ce n'est bien entendu que relatif, car les prix à la production avaient baissé en Angleterre à la suite des premiers effets de la Grande dépression alors que l'inflation était encore modérée en France jusqu'en 31-32 ce qui explique que BOUDENE ait pris le risque de laisser imprimer des prix.
10jackymotoSamedi 25 Janvier 2020 à 20:34Voui, mais le gars qui achetait (à prix d'or) une KTT, avait quelques chances de gagner des courses pour amortir son acquisition...
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Pas facile de concilier une moto moderne techniquement avec un prix de vente compatible avec les salaires de l'époque. De toute ma vie je n'ai vu qu'une Dollar à cardan alors que cette option était proposée par le constructeur. Les BMW étaient déjà classées à l'époque comme "motos de riches". La plupart des clients désiraient une moto pour se déplacer au moindre coût. La concurrence avec certaines petites voitures d'occasion devenait sérieuse. Même aux USA les quatre cylindres se sont toujours vendues au compte gouttes, avec les Ford et autres Buick aux fesses.
je n'ai moi aussi vu qu'une Dollar à arbre, c'était cet automne : la 350 qu'un copain venait ait juste de restaurer impeccablement
FAJ