• MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Rappel : ce blog prend la suite de celui qui était connu depuis août 2011 sous le nom "Z'humeurs & Rumeurs", blog toujours consultable mais en sommeil désormais.

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    EN BOIS D'ARBRE OU EN BRONZE ?

    Après avoir "visité" dans les deux précédents articles l'art motocycliste d'avant 1914, on traverse tout un siècle et on change de continent pour découvrir la moto dans l'art africain. Depuis ses origines ou presque, la moto y a été présente. De façon épisodique, MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)
    c'est certain, mais bien réelle comme en témoigne une photo d'une F.N. 4 cylindres au pied des Pyramides d'Egypte ! Présente ? Soit. Mais représentée ?
     

    L'évangélisation forcée des populations pratiquée par les ordres religieux catholiques ou protestants a amené les bien connus "bons Pères Blancs à moto" dans les colonies établies par les pays européens. Apparemment sans laisser de traces chez les populations autochtones, hormis quelques cartes postales et photos prises par le colonisateur. La période contemporaine est plus riche car influencée par... le Paris-Dakar ! L'art traditionnel africain s'est exercé sur des objets "magiques", des masques, des portes de cases, des reliquaires, aussi sur des armes. Il nous a laissé des sculptures en bois ou en métal. Il était donc tout naturel que la moto devienne un sujet artistique populaire à partir du moment où elle a fait partie d'un environnement quotidien, ou presque.

    (Cliquer sur les images pour les agrandir)

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

     Cette pièce en bois de grandes dimensions (46 cm de longueur), mais très légère, a été chinée sur le trottoir d'un marché aux Puces. Impossible donc d'en connaître le pays d'origine, de plus le vendeur n'était pas africain. J'ai d'abord pensé à un faux fabriqué par la petite industrie des vendeurs à la sauvette africains. Ceux qui proposent ce genre d'objets "arrivés tout juste du pays, patron", mais qui se fournissent  chez des grossistes parisiens. Et puis, en réfléchissant, on se dit que quitte à fabriquer des fausses antiquités, autant que ce soit des objets d'une valeur reconnue ou, à l'opposé des figurines à deux balles fabriquées à la chaîne et vendues au pied de la Tour Eiffel. Il paraît qu'il n'y a plus rien d'authentique sur tout le continent africain tant il a été pillé au cours de dizaines et de dizaines d'années de colonisation.

    Alors, je vous le demande, qui (à part moi) va s'intéresser à une rustique sculpture en bois mal peint représentant un motocycliste qui n'a même pas une position correcte sur sa machine.  Et celle-ci n'a pas la prétention d'être vieille puisqu'elle arbore une fourche télescopique ! Un indice sur l'origine pourrait être fourni pas l'écusson sur le réservoir, sa forme et surtout ses couleurs. Hélas, du Burkina-Faso à la Zambie en passant par le Mali ou le Zimbabwe, il y a une quinzaine de pays qui utilisent ces couleurs dans leur étendard national. Donc, de ce côté, c'est chou blanc !

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

     Aucune signature possible ne pourrait nous guider. D'autant que dans l'art traditionnel africain on ne signe pas son œuvre, du moins pas sous la forme que nous connaissons en Occident. Mais, de même qu'au cœur de la forêt tropicale une branche cassée d'une certaine façon sur un buisson est un signe de reconnaissance, de même un sculpteur africain, un graveur, etc. savent se faire reconnaître par une manière de travailler la matière, le choix du sujet, des signes géométriques, bref ce qui finalement constitue bien le style d'un artiste. La coiffure, la forme du nez et des yeux peuvent fournir des indications sur son ethnie. À vous d'exercer votre savoir éventuel sur ce portrait du pilote ci-dessus. 

    MOTO ET ARTS POPULAIRES

    La curieuse position du pilote fait penser à celles des ados de nos contrées qui font les kakous sur des scooters. Mais il pourrait tout aussi bien s'agir d'un début de wheeling sur une moto carénée . Dans le doute, on ne tranchera pas, alors si j'ai du nouveau un jour, vous serez tenus au courant.

    Remarquez-bien que je mets un "s" à tenus car, à c't'heure, vous êtes déjà 47 aventuriers à être venus sur ce nouveau blog depuis son ouverture. Je crois que je vais avoir un peu de mal à retrouver les 190 000 visiteurs drainés par "Zhumeurs & Rumeurs"...

    RETOUR VERS L'ÂGE MODERNE DU BRONZE

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Retour à nos artistes africains qui sont célèbres pour leur travail du bronze ou plutôt un alliage à base de ce métal lourd (beaucoup de laiton de récupération : robinets et divers). C'est vrai qu'elles sont lourdes ces motos réalisées selon la technique de la cire perdue. Ce poids a causé l'affaissement de la fourche qui à l'origine devait être droite. Avec ses clignotants, ses roues à branches et ses rétroviseurs, elle a nécessité un travail assez précis. Sur le garde-boue avant ainsi que sur la plaque arrière  figurent ce qui ressemble à une immatriculation (KK 317) ou encore une façon codée et ingénieuse de signer son œuvre (?).

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Gros plan sur les visages aux traits fortement marqués : nez busqués, yeux en amande mais peu ouverts. Les coiffures sont aussi des éléments indicatifs, sauf s'il s'agit de casques motocyclistes stylisés. Mais pour autant qu'on sache, le port du casque en Afrique...

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Il semble que la présence d'un passager soit une rareté car, jusqu'à présent, c'est le seul exemple connu d'un tel équipage en duo. D'autant que le procédé d'exécution à la cire perdue fait obligatoirement de chacun de ces objets un exemplaire unique.

    AUTRE  MOTO EN BOIS, MÊME ARTISTE ?

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    ... on peut se poser la question tant les deux motos se ressemblent, alors qu'elles ont été trouvées à plusieurs années d'intervalle et dans des lieux très éloignés l'un de l'autre, quoique toujours en région parisienne.

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Les similitudes portent sur la taille (55 cm de long), ensuite la matière employée, toujours un bois léger et tendre. Et aussi la façon de représenter les pièces caractéristiques de la machine : la fourche avec ses soufflets ou ressorts apparents, les roues à branches, creusées et peintes ensuite. On serait tenté de trouver que l'artiste a progressé en connaissances et signe une œuvre plus réaliste (présence du levier de frein et du sélecteur, ailettes du moteur, silencieux). La position du personnage couché sur le réservoir dégage une réelle impression de vitesse à l'opposé de l'acrobatie de son autre réalisation - s'il s'agit bien du même auteur... Au cas contraire, il peut se vanter d'avoir un imitateur, ou un élève, ce qui est la consécration des grands artistes ! 

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Nez droit, grands yeux ouverts sous des sourcils accentués, coiffure disciplinée, peut-êre autant d'indications pour un connaisseur dont on sollicite le verdict éventuel (?).

    VOUS REPRENDREZ BIEN UN PEU DE BRONZE ? 

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Nouvelle moto signée, cette fois sur une plaque avant transversale ce qui n'est pas courant et constitue un indice quant à l'origine. Vous qui êtes allés partout dans le monde, vous nous direz dans quel pays on fixe ainsi la plaque. La moto est identifiée par un énorme BMW sur ce qui représente le cache arrière, en dessous de la selle. Si elle elle inspirée par le Paris-Dakar, les clignotants sont de trop, mais les roues à rayons l'éloignent d'une machine administrative. Ce qu'elle pourrait être car des BMW ont équipé de nombreuses polices du continent africain.

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Sur ce qui fait office de tableau de bord, un compteur (vitesse ? tours-minute ?) à l'étrange boîtier carré, mais l'aiguille est bien visible. À l'arrière-plan, sur la plaque avant à l'envers on peut lire : AP1 C11, de même que sur la plaque arrière.

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

     Le phare est très aplati et strié, figurant une grille protectrice. Le moteur n'a rien d'un flat-twin, mais ses ailettes nombreuses ont marqué l'imagination de l'artiste, de même que son aspect massif. Les nervures du réservoir gardent leur secret : pure décoration ou rappel de scarifications semblables à celles que pratiquaient les humains de certaines ethnies ?

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    ... et à nouveau les traits du visage vus plus hauts : nez busqué, yeux "fermés" en amande.

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    L'évolution amène à une représentation qui frôle la réalité au point qu'on arrive presque à la maquette ou au modèle réduit. On a progressé dans le réalisme, on s'éloigne de la tradition, mais la poésie y perd grandement. 

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Le gros monocylindre XT de Yamaha au glorieux palmarès africain doit être à la source de ce bronze aux soufflets de fourche bien marqués et comme le nom figure sur le réservoir... On dirait même que le casque du pilote est le léger modèle "chips" répandu dans les années 80, alors que le visage a gardé les traits traditionnels.

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    À l'automne 2013, la Galerie Vallois (35 rue de Seine à Paris), exposait les œuvres d'artistes du Bénin sur le thème "De la tradition à la modernité". Inspiré par des scènes de la vie quotidienne de son pays, Euloge Glélé a présenté des terres cuites dont celle-ci (Document Galerie Vallois). Réaliste à l'extrême, elle rejoint ces petits objets en céramique ou en résine proposés dans les boutiques de souvenirs "folkloriques" en France. On est de plus en plus loin de la cire perdue !

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Le Sénégal est lié à l'histoire du Paris-Dakar, et l'artisanat local a produit quantité de petites motos ou scooters en tôle de récupération (canettes, boîte de conserve, bombes à peinture). Assemblés sans colle ni soudure, avec du fil de fer et des bandes de caoutchouc taillées dans de vieilles chambres à air. Si vieilles que ce caoutchouc se désagrégeant vous vous retrouviez avec des bouts de métal difficiles à identifier. Certains magasins d'art africain en France les proposaient. On peut même soupçonner que beaucoup étaient fabriqués chez nous ! L'exemplaire ci-dessus est absolument authentique, arrivé directement du Sénégal, la "vacancière" qui l'a rapporté étant chargée de mission avant son départ !

    MOTO ET ARTS EN AFRIQUE (3)

    Cette machine roulante a pu traverser plus d'un quart de siècle sans dommage car elle est assemblée par soudure. Un travail soigné qui vaut celui qu'on constate sur les cadres des  japonaises modernes... Soignée aussi la plateforme-châssis dont les bords sont ourlés pour ne pas blesser les doigts. Elle aussi se présente avec des clignotants et un phare dont la peinture rouge renforce la puissance d'éclairage ! L'architecture du moteur laisse perplexe : moteur thermique rotatif (on distingue le long silencieux, à droite sous la "plateforme") ou électrique ? Vu la taille du réservoir et du bouchon de remplissage, on doit être en présence d'un deux-temps...

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