LA FRANCE DES ANNÉES 50 est celle des hybrides appelés "Cyclos-scooters qui témoignent bien de la perplexité des constructeurs nationaux. Leur absence de "vista" a fait qu'ils n'ont d'abord pas cru au succès énorme du scooter, tétanisés qu'ils étaient par les échecs précédents de cette formule dans les années 20. Et aussi par une frilosité réelle devant les progrès des techniques modernes et la recherche tels qu'on les trouvaient chez nos voisins germains et transalpins. La Paloma (ci-dessus) est un bon exemple de ces créations qui paraissent plus improvisées que cogitées par un service d'études. D'ailleurs, même chez nos plus grandes de nos marques, ce service se réduisait à un ou deux hommes dans la plupart des cas.
Exemple du "progressisme" tel qu'il était pratiqué par un constructeur français (qui n'était pas l'un des plus mauvais...). Le 100 VML à moteur Villiers 2 vitesses devient le VMLS dont le "S" est justifié par la burlesque fourche à suspension Grégoire en place d'une télescopique. Des sabots protecteurs, des moyeux "monobloc" et des garde-boue plus enveloppants sont les autres différences.
À propos de la photo de Motocycles, on notera l'effort "promotionnel" de la revue qui a fait appel à une vedette du cinéma, Nathalie Nattier. Elle fut rendue célèbre pour son rôle dans "Les Portes de la Nuit" (1946 - Marcel Carné), dont elle partageait la vedette avec un Yves Montand alors débutant et dont c'était le deuxième film. Ce gros succès lança le destin planétaire de la chanson "Les feuilles mortes" (Prévert & Kosma).
LES ÉQUIPEMENTS AU SALON
... D'abord pour le pilote : Macombynn est une réelle amélioration contre les éléments hivernaux, froid et surtout pluie. Un nouveau matériau synthétique apparu en 1947 est exploité par la marque Cordoual (bagages, fauteuils...
Un p'tit miquet explique le mode d'emploi.
... canapés) est utilisé en remplacement du cuir, il offre résistance à l'usure et étanchéité totale. Des avantages revendiqués et justifiés, même si c'est au prix de l'élégance du motocycliste. L'élégance, c'est aussi la coiffure...
... qui est du domaine de Bayard dont le casque assure la sécurité des motards de la police parisienne. Son Chapeau Fort, par contre, semble un peu léger en matière de protection. Néanmoins, il sera porté par quelques scootéristes auxquels ils donne une allure recherchée, plus discrète donc moins "motarde". Et puis, le casque n'est toujours pas obligatoire.
Les lunettes sont un complément indispensable, et ROD offre un modèle dit "Compétition" qui fera autant d'usage que les britanniques Mark VIII ou Baruffaldi des pilotes de Grand Prix. C'est français et beaucoup moins cher.
Pour la tête, il y a un choix limité à quatre ou cinq marques, mais pour les pieds, c'est maigre. Il faut chercher du côté des cavaliers pour des bottes très belles (modèle "Écuyère" Marcy), très chères, et vraiment pas adaptées à la moto. Enfin Pataugas est arrivé ! N'ayant pas de moto à moi, je n'en ai pas acheté, mais la Mère Patrie m'en a offert une paire tout à fait gratuite quelques mois plus tard. Durant deux ans et demi, je les ai testées 24 heures sur 24 ou presque. C'était la même marque, mais pas le même modèle. Les miennes, comme celles de quelques dizaines de milliers de Bidasses, étaient en toile couleur kaki comme tout l'ensemble de mon costume... C'était un modèle increvable et devenu tout à fait mode (*) puisqu'il est encore aujourd'hui, mais dans diverses couleurs, au catalogue des Mauléonais (ceux du 64, pas du 79).
(*) Si vos copains cherchent du "vintage", en voilà du vrai !
La célèbre remorque RUBY a trouvé en RETRU un concurrent qui ne semble pas avoir connu une longue carrière, du moins dans cette spécialité du "Transport des enfants en toute sécurité" (Texte de la publicité parue seulement dans Motocycles). Conforme à l'arrêté du 16 juin 1936 (?), cette monoroue à suspension oscillante était transformable en utilitaire et livrable en mono ou biplace (RETRU Constructeur à Panissières. Loire)
La perfide perle à la bougie est le gros souci qui guette le moteur deux-temps et les astuces de fabrication abondent pour tenter de résoudre ce problème.
Dans le vacarme de la circulation urbaine les avertisseurs que la loi n'a pas encore interdit, ont du mal à faire entendre leur couinement en 6 volts sur les motos. Rotorson vient à leur secours avec cet appareil entraîné par le volant magnétique. Reste qu'à l'arrêt, plus de pouêt-pouêt !
Avec son moteur sur le côté et sa roue avant sur monobras, le scooter Vespa suscite quelques inquiétudes touchant à sa tenue de route. Les Ets Stabilex se sont penchés sur le problème et proposent le Scooter-Stabil, un deux-en-un "stabilisateur et antidérapant". Il se compose d'un tube dans lequel coulisse "sur un axe une masse réactionnelle combinée avec des ressorts amortisseurs. On compte sur l'inertie des masses pour maintenir en ligne la machine dans les virages". À voir l'aisance avec laquelle les derniers coursiers sur Vespa (le vrai, en tôle) virevoltent, on se dit que l'accessoire a dû faire un bide.
UNE MAUVAISE NOUVELLE
Dans Moto Revue du 13 février 1954
DU CÔTÉ DES GRANDS PRIX
Dans la plus prestigieuse des catégories, la 500 Gilera 4 cylindres est toujours au mieux de sa forme bien servie par des pilotes britanniques, Dickie Dale et Reg Armstrong menés par Geoff Duke. Derrière eux, il faut la folle audace d'un Ray Amm pour leur chiper les premières places. Le Rhodésien est le seul encore capable d'utiliser les ultimes chevaux du monocylindre Norton. D'un GP à un autre, tout a été essayé par Joe Craig, son metteur au point, jusqu'au carénage longtemps jugé "déloyal" par l'école anglaise. Avant qu'elle s'y rallie, comme ce fut le cas avant la guerre (Velocette et AJS), lors de l'apparition du compresseur sur les allemandes et italiennes.
S'il faut un carénage, OK. Mais ce sera à la manière Norton qui accoucha de deux modèles différents. D'abord une Fish (ci-dessus) qui est venue battre des records à Montlhéry en octobre 1953. Très basse, lourdement carénée, le pilote y est à genoux (d'où Kneeler, son autre surnom) sur des réservoirs logés sous son nez et de chaque côté du moteur. Elle disputera une seule épreuve, le North West 200 en Irlande du Nord où Amm, alors en tête, abandonne sur incident mécanique. Vieux renard de la mécanique, Joe Craig essaiera tout et n'importe quoi pour sauver son bébé d'un désastre qui menace car le 4 cylindres tant réclamé a été abandonné en 1952, apparemment pour incompétence de BRM. Raison avancée : le moteur n'avait pas été conçu pour être monté dans une moto... Avant le North West 200, Amm avait couru en Belgique à Floreffe sur une 500 équipée d'une curieuse fourche avant à roue tirée. Ce sera sa seule apparition. Plus légères et bien carénées, les Guzzi - monocylindres - dominent en 350 malgré les efforts de Amm et des ses co-équipiers Kavanagh ou Brett. Comble de malheur pour Norton, le Rhodésien se fracture une vertèbre au GP de France à Rouen, quatrième des huit épreuves du Championnat du monde 500.
L'instant fatal à Rouen 1953 dans la descente vers l'épingle du Nouveau Monde.
Mais je vois qu'on me fait signe depuis la cabine de réalisation... Dans mon oreillette on me dit que j'ai mis trop de documents dans mon article ce qui risque de gêner la lecture pour mes milliers de lecteurs. Chers amis, je vous dis donc au revoir, mais restez à l'écoute pour le suite...