J'AI LU QUELQUE PART sur Facebook qu'une certaine Isabelle B. s'interrogeait sur l'identité du moteur équipant la machine qui avait emmené le champion cycliste Jean Brunier à plus de 120 km/h, exploit immortalisé par cette carte postale de 1925 jointe à son courrier à FB ...
... ce qui m'a ramené quelques années en arrière - presque 10 ans - lorsque je planchais sur "La Motocyclette en France 1922-1924" et que je m'étais posé la même question qu'Isabelle. La réponse que je cherchais, moi, en 1924 se trouvait en fait dans l'année suivante : 1925. Le mercredi 4 novembre de cette année-là, paraissait Le Miroir des Sports relatant l'évènement en couverture, suivie d'une page intérieure abondamment illustrée.
C'est évidemment l'exploit sportif du cycliste Brunier qui a intéressé Le Miroir et pour en savoir plus, il fallait chercher ailleurs. Par exemple dans un article de deux pages du célèbre Je Sais Tout qui présentait la machine en préparation pour la tentative de record et où il n'était pas encore question de carénage. Le texte un peu passe-partout de l'article était heureusement très bien illustré ce qui m'a permis...
... de le republier in-extenso dans mon livre - ci-dessus et ci-dessous - avec le peu de caractéristiques techniques qui concernaient le moteur. D'une autre source (laquelle ?) il était dit que ce moteur culbuté avait été emprunté à une voiture, peut-être une Rosengart.
C'est à peu près tout ce qu'on pouvait savoir à l'époque, bien que Je Sais Tout se soit donné la peine de fournir en vignette (en haut à gauche) une explication du fonctionnement d'une soufflerie aérodynamique, avec une coupe qui représente...
... celle du Laboratiore Aérodynamique Eiffel (Gustave, celui de la Tour). Construite à l'origine sous la Tour, elle fut ensuite transportée à Auteuil. C'était la seule existant alors en France, celle de Chalais-Meudon n'étant été mise en chantier qu'à partir de 1932.
Le visage de Léon Lauthier était protégé par un masque en mica muni d'un tube terminé par une entonnoir débouchant sous son bras. Cet ingénieux système était censé lui permettre de communiquer avec son cycliste afin que ses paroles ne soient pas écrasées par le vent de la course...
Dans Le Miroir des Sports, le lyrique reporter de l'exploit, André Heuze, terminait son article en écrivant de Lauthier : "C'est encore un homme, mais il participe déjà de la machine".
ET LE MOTEUR ?
Le blog stayer-fr.blog4ever.net donne aujourd'hui des précisions sur cette conquête du record de l'heure cycliste, mais rien n'y figure sur le moteur de la machine de l'entraîneur. Grâce au ouèbe, on trouve désormais quelques renseignements succints mais accompagnés d'une précieuse photo d'un Altos 4 cylindres qui pourrait être celui de la moto-monstre de Léon Lauthier.
D'apparence classique, même banale, il est ainsi représenté sans changements dans toutes les annonces publicitaires du constructeur A. Bonnet visibles sur le ouèbe. On en est réduit aux suppositions concernant le dispositif qui a permis d'adapter la transmission par courroie directe puisque il n'y a pas de boîte à vitesses ni embrayage (?). Il est probable que la moto était lancée sur un tour de la piste de Montlhéry et que le cycliste la prenait "au vol" lors du tour suivant, pratique courante sur vélodrome.
Seul Dunlop s'est servi publicitairement du record de Brunier qui tiendra jusqu'en 1928, battu par le champion belge Léon Vanderstuyft parcourant 122,771 kilomètres dans l'heure. Pour ce faire, il avait choisi une mécanique motorisée moins volumineuse que celle de Brunier, mais tout aussi spectaculaire dans le genre classique...
C'est le "stayer" suisse Rudy Lehmann (*) qui avait construit la machine de 1928 à la cylindrée inconnue mais sans doute considérable (Anzani ? BAC ?). Un lourd volant extérieur a été ajouté afin de modérer les accélérations de la bête à transmission directe comme on voit, ce qui ne permettait aucun glissement comme la courroie habituelle. Il ne fallut pas moins de quatorze essais avant que la tentative finisse par aboutir. Malgré tout, à l'arrivée, Lehmann avait constaté que les fixations de la couronne arrière commençaient à céder...
(*) Au début du siècle, Lehmann a couru à motocyclette pour Alcyon. Précision : le "stayer" est le cyliste, mais l'usage a fait que le terme s'est populairement appliqué au motocycliste ou à sa moto, indifférement
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