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De Dion et ses motos
BIEN QUE RÉPANDU À PLUSIEURS MILLIERS D'EXEMPLAIRES, les tricycles à moteur De Dion-Bouton (de cette marque ou chez des concurrentes) n'ont eu qu'une courte carrière. Le quadricycle puis la voiturette et enfin la motocyclette auront raison de lui à partir de 1902, date à laquelle cessa la fabrication du M, dernier type de moteur pour tris et quadris (2 hp 3/4 et 3 hp 1/2). Curieusement, De Dion a "sauté" la case moto, bien qu'on en trouve une dans le catalogue D.D.B. de Puteaux daté 1898-1899.
Cette machine est probablement une version élaborée à partir de celle avec laquelle, en avril 1898, Georges Osmont "matcha" Fernand Charron durant 10 tours de Longchamp (35 kms). Charron gagna le match avec un tour d'avance... et les 10 louis qui avaient été fixés comme enjeu.
Une spéciale signée de Léonce Girardot ne versait pas dans la simplicité mécanique. Comme sur sa rivale, le problème de la transmission fut résolu de manière radicale et sans doute fort bruyante. Girardot deviendra ensuite le "G" de la marque automobile C.G.V. (Charron, Girardot & Voigt)
La moto utilisée par Osmont sera la seule et unique "Motocyclette De Dion" car elle ne figure plus dans les catalogues suivants. Ce qui n'empêche pas qu'il existe aujourd'hui de nombreuses "motos De Dion" chez les collectionneurs européens et jusqu'aux États-Unis !
Certaines sont d'authentiques réalisations d'époque dues à des "mécaniciens" doués, capables de construire une partie-cycle autour d'un moteur De Dion acheté nu ou "cannibalisé sur un tri ou, plus tard, une voiture. Dans les débuts, ce sont surtout les entraineurs de stayers qui vont signer ces "bitzas".
Pour "tirer" le cyliste en douceur et sans à-coups, il faut un gros couple-moteur qui ne peut s'obtenir qu'avec une forte cylindrée. La puissance étant secondaire, on n'a pas besoin d'un moteur qui tourne vite, d'où la présence de monocylindres destinés à la voiture plutôt qu'à la moto. Des téméraires accoupleront côte-à-côte deux de ces moteurs, mais ils n'obtiendront guère de succès, sauf auprès des foules des vélodromes, seuls endroits où ils peuvent évoluer sans trop de risques.
Cependant, au prix de quelques aménagements mineurs, on peut en faire des machines rapides pour se mesurer entre entraîneurs. Démonstration par Anzani soi-même qui monte la moto qui est sans doute la Hurtu de la photo précédente. Seule différence visible outre le guidon, la courroie de transmission a été remplacée par une chaîne, la progressivité n'étant plus nécessaire dans une épreuve de vitesse.
Autre exemple d'une machine destinée à aller vite, cette fois sur route, puisque c'est Henri Cissac au pesage avant une épreuve qui s'annonce humide (Dourdan 1903 ?). Son moteur De Dion "à cloche" est énorme, sans doute d'un modèle destiné à une voiturette. On remarque à droite le crieur de journaux qui fait une discrète publicité en dépliant la manchette de Le Vélo journal au titre mentionné sur sa casquette.
Étrange tandem à l'allure de machine d'entraînement mais avec une chaîne et un gros pédalier synonymes de performances sur route. Il figure sur une toute petite photo mais, hélas, jamais revu dans la littérature de l'époque !
Autre réalisation personnelle d'un tandem américain sur lequel, en plus du moteur, on a utilisé toutes les pièces récupérables provenant d'un tricycle De Dion : boîte à piles, réservoir triangulaire, bobine et même le silencieux (derrière le talon du pilote). La position du "mécanicien" indique bien qu'il s'agit là d'une machine d'entraînement.
Autre tandem d'entraînement français, le Richard-Choubersky de 1899, avec toujours beaucoup de chaînes... Comme chez l'américain, le moteur est du type "à cloche" apparu en 1898.
Encore une réalisation personnelle qui méprise le tube au profit de la tôle pliée en tous sens. S'il manque d'élégance, l'ensemble est robuste et constitue sans doute ce qui est le premier "cadre-poutre" motocycliste. Délicate pensée, le porte-ombrelle en osier pouvait constituer un argument tentateur pour la gent féminine...
La réputation du De Dion permit à plusieurs constructeurs étrangers de se lancer dans la motorisation comme le montre ci-dessus cette Marsh américaine. En 1900, le tandem d'Oscar Hedstrom à moteur D.D. battait tous les records sur les vélodromes américains, attirant l'attention d'un certain G. M. Hendee. Tous deux allaient bientôt s'associer pour fonder Indian.
Autre machine équipée d'un moteur De Dion à "cloche" cette Zeus, dotée d'une plomberie d'alimentation... intéressante fait aujourd'hui l'orgueil d'un musée d'Europe centrale
Sans oublier le Rosbifland où BAT proposait en 1904 ce "Pullman Car of Motor Cycles" à moteur MMC, la marque qui produisait le De Dion sous licence.
Le côté "Pullman" de la BAT se limitait à une suspension élastique compliquée de la selle dont le fonctionnement sur route cahotique devait être riche de sensations rares. Ce système - simplifié - est à rapprocher de celui des Harley-Davidson à venir.
Venu du double-fond de mon ordinateur, cette moto-scooter qui doit figurer, à en juger par sa selle à franges, dans un musée étasunien. Plus que son moteur D.D., c'est sa suspension de roue avant qui vaut le coup d'œil de même que sa commande de direction.
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Je vous en garde encore quelques unes du même goût pour une prochaine parution. Restez à l'écoute !
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Commentaires
1Malterre92Mercredi 14 Août 2019 à 00:01Je suis toute ouïe !Répondre3jakymotoJeudi 15 Août 2019 à 14:08Une histoire amusante: le marquis, homme moderne mécaniquement, était très réac politiquement et s'était retrouvé au tribunal pour avoir crié" Vive l'empereur " devant la maréchaussée, pendant une manifestation. Il se défendit en disant qu'il avait crié " Vive l’Ampère heure " pour fêter la fée électricité....
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Vendredi 16 Août 2019 à 12:15
Il s'est aussi battu en duel à plusieurs reprises, d'où les épées de son portrait-charge dans l'image d'ouverture de mon article.
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